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 Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed

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Gabriel MacGregor
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MessageSujet: Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed   Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed EmptyMar 29 Sep - 19:03



Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past.




« I said I bet that you look good on the dance floor, dancing to electro-pop like a robot from 1984 » D'une bonne humeur peu habituelle, le propriétaire du holy grail tattoo chantonnait tout en consultant son carnet de rendez-vous sur l’ordinateur pour l'après-midi. Sa journée risquait d'être plutôt tranquille, avec un seul et unique client venu pour un tatouage. Un nouveau client, qu'il n'a vu qu'une fois lors de la prise de rendez-vous. Le type s'appelait visiblement Cináed McIntyre. Levant les yeux au ciel pour tenter de se rappeler avec netteté la tête du client, Gabriel esquissa un sourire. Grand, blond, plutôt baraqué et la trentaine. Avec application et pendant plus de deux semaines, le tatoueur avait travaillé sur le design souhaité par le client. Il allait se chercher de compléter le travail d’un autre artiste, récemment parti à la retraite. Afin que son style colle au mieux à celui de l’autre tatoueur qui avait commencé le travail sans l’achever, le brun avait passé un long moment à observer les photos des autres tatouages de son client.

Les motifs celtiques demandés par son client étaient assez complexes, il fallait également y ajouter certaines phrases en ancien gaëlique. Curieux de savoir où il était allé chercher de telles phrases, l’asiatique avait passé de longues heures sur internet à en rechercher la signification ainsi qu’une traduction en anglais moderne. Et contrairement à d’habitude, la plus célèbre des encyclopédies en ligne n’avait pas su lui répondre avec précision. Combien de paquets de cigarettes y étaient passé ce soir-là, pendant qu’il faisait ses recherches ? Les traits tirés par la fatigue mais tout de même heureux d’avoir trouvé une réponse à ses questions, il avait réussi à dessiner quelque chose dont il était satisfait. Restait à savoir si ça allait plaire au client. C’était la partie la plus difficile du métier  selon lui : satisfaire la personne que l’on va encrer pour toujours. S’il ne manquait ni de créativité ni de technique, il arrivait parfois qu’un client n’aime pas du tout ce qu’il avait dessiné pour lui. Il fallait alors reporter le rendez-vous, créer autre chose et perdre du temps et de l’argent.

Regardant son dessin une nouvelle fois tout en fredonnant l’air de la chanson qui passait actuellement à l’intérieur du salon, l’asiatique salua de manière distraite une cliente sortant d’un rendez-vous avec un hochement de tête discret. Le temps maussade d’aujourd’hui lui convenait tout à fait. En ayant passé toute sa vie ou presque à Edimbourgh, il avait su s’habituer à la météo et s’en accommodait sans mal. Au contraire, c’était lors des jours ensoleillés que Gabriel était d’une humeur massacrante. Enfin, d’une humeur plus terne qu’à l’ordinaire. On ne pouvait pas dire que le propriétaire de l’établissement était une personne dont la bonne humeur irradiait. Pourtant en ce début d’après-midi, il avait pour une fois décrocher un sourire à la secrétaire qui se chargeait des rendez-vous, de la comptabilité et de tout ce genres de trucs bien chiants auxquels il ne comprenait pas grand-chose.

Levant les yeux en entendant la clochette au-dessus de la porte, voilà que le tatoué esquisse un second sourire ravi. Un jour à marquer d’une pierre blanche. Son client était enfin là. S’approchant pour le saluer à l’aide d’une poignée de main franche, Gabriel engage la marche vers l’arrière-boutique où se déroulerait la séance de tatouage.

«  Cináed, c’est bien comme ça que ça se prononce ton nom ? J’te laisse te mettre à l’aise et regarder ce que j’ai dessiné pour toi pendant que je prépare tout ce qu’il faut. Si il faut modifier quelque chose au dessin, hésites pas à le dire. »

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MessageSujet: Re: Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed   Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed EmptySam 10 Oct - 0:37


Gabriel & Cináed


Enfin, l’œuvre allait être achevée. Enfin, l’œuvre allait prendre tout son sens et lever le mystère sur ces représentations abstraites à l’œil nu et pourtant sensées à l’œil expert. Cináed allait enfin terminer la manchette inachevée qu’il avait tatouée sur son bras. Malheureusement, l’artiste qui avait débuté le tableau était parti à la retraite quelques semaines auparavant, laissant le conservateur d’abord désemparé. A l’image d’une peinture ou d’une fiction, le tatouage était d’abord le travail d’une seule personne même si son élaboration sortait uniquement de l’imagination du blond. C’était lui-même qui avait choisi les motifs celtiques qui allaient compléter la fresque ainsi que multiples citations qui sortaient tout droit d’ouvrages centenaires en gaélique désormais oubliés des lecteurs contemporains. Mais ces dernières semaines avaient plutôt été dédiées à trouver un nouveau tatoueur, quelqu’un de suffisamment talentueux et ancré dans l’atmosphère écossaise pour comprendre l’ampleur du travail. Le jeune homme se montrait volontairement des plus difficiles et déjà une dizaine de professionnels étaient passés sans qu’il ne puisse trouver chaussure à son pied. Jusqu’à ce qu’une petite boutique dans une rue escarpée ainsi que son gérant aux traits asiatiques n’attirent son attention. C’était peut-être ironique, contredisant tous les préjugés très actuels de ce qu’était un local, mais ce fut lui qui sembla le mieux appréhender le labeur à accomplir ainsi que l’enjeu d’un tatouage qui comptait beaucoup pour Cináed. Il y voyait le souvenir de son père, les réminiscences de son éducation, de son imagination d’enfant, de ses craintes comme des visions d’avenir, la représentation de l’irréel comme du concret qui le prenait à la gorge. Tant d’éléments qui tissaient la toile encrée de son existence ici. Le rendez-vous était pris et la sérénité avec laquelle l’archiviste franchit la porte du studio acheva de le convaincre du bien-fondé de son choix.

Celui qui s’appelait Gabriel l’accueillit avec un sourire rassurant et ce fut avec la même expression enjouée que Cináed le salua à son tour. Rien n’était plus apaisant que l’euphorie qui précédait et accompagnait l’expérience si particulière de se faire tatouer. Il ne pouvait pas dire qu’il n’avait eu jamais mal – ses index tatoués demeuraient encore un douloureux souvenir – mais le résultat surpassait toujours l’endurance. « C’est ça. » Même pour les locaux comme eux, la prononciation des prénoms typiquement écossais restaient parfois obscures et on ne pouvait pas dire que son paternel ne s’était pas appliqué à lui affubler un prénom atypique. « Pas de problème. » ajouta-t-il, plutôt impatient. Il s’installa tranquillement sur le fauteuil qui accueillait les clients tandis que Gabriel vaquait à ses préparatifs. Cináed n’hésita pas à se mettre à l’aise, se débarrassant de sa chemise qui serait de trop lors de la séance. Il s’empara alors des dessins définitifs afin d’admirer son tatouage complété sur le papier. C’était parfait. Encore une fois, il fut d’autant plus surpris d’avoir trouvé quelqu’un d’autre qui semblait avoir saisi les origines et les enjeux des motifs. Ses yeux clairs s’égarèrent un instant sur le dessinateur, curieux de déceler un indice qui l’aiderait à comprendre. « Merde, j’ai rien à dire. Si j’avais su, ça m’aurait évité d’expliquer au vieux chaque nœud et chaque mot. » Lança-t-il, guettant Gabriel pour savoir si lui avait compris de quoi il en retournait. Il étudia à nouveau les dessins, se les imaginant déjà sur son bras avant de conclure : « J’ai rien à ajouter. Enfin si, tu me tortures quand ? » Bien entendu, il plaisantait. Il suffisait de jeter un coup d’œil à son torse, son dos, ses bras et ses mains pour comprendre qu’il était passionné par cet art. « En tout cas, merci d’avoir accepté de reprendre le travail d’un autre. Je sais que ce n’est pas facile. » Alors, quand est-ce que les hostilités commençaient ? A l’aise, Cináed se laissa aller contre le cuir protégé du siège, prêt à passer un moment intéressant en compagnie d’un camarade.
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MessageSujet: Re: Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed   Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed EmptyDim 25 Oct - 2:49



Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past.




Le dessin semblait convenir parfaitement à son client. Esquissant un sourire ravi, s’installant sur son tabouret et allumant la lumière pour y voir clairement, l’asiatique se saisit d’une solution stérile pour préparer la peau. Le torturer, il allait y venir. « Un grand garçon comme toi, tu devrais tenir le coup. » Quoi que. Il avait déjà vu de frêles adolescentes plus résistantes que des hommes à l’apparence virile lorsqu’il fallait se faire tatouer une zone sensible, comme les cotes par exemple. Gabriel lui aimait la douleur que procurait le tatouage. Il aimait sentir les aiguilles pénétrer sa peau, quitte à grimacer de temps en temps lorsqu’il fallait se faire tatouer un endroit délicat. Il avait eu son premier tatouage à vingt ans, après avoir pris le temps d’y réfléchir quelques années. Son corps était en perpétuelle évolution, et malgré le fait que sa peau soit déjà bien chargée il n’avait toujours pas terminé.

Appliquant le stencil sur la peau du client avec précision pour venir compléter la pièce, hochant la tête satisfait voilà qu’il se désinfecte consciencieusement les mains avant d’enfiler une paire de gants stériles. L’hygiène ? C’était la chose la plus importante selon lui dans un salon de tatouage. On n’est jamais trop prudent, et il était hors de question que l’un de ses clients ressorte du Holy grail avec une hépatite ou le sida. « Je trouve ça stimulant d’être mis au défi, de devoir m’adapter au travail d’un autre. Je ne t’aurais pas envoyé vers l’un de mes employés pour faire un truc pareil. Ils sont doués, mais encore jeunes Et pas assez expérimentés pour un tel projet. »

Vérifiant rapidement que sa machine fonctionnait correctement, voilà qu’il plonge l’aiguille dans l’encre avant de commencer son travail. Les gestes sont précis, plutôt lents mais tout de même délicats. Faire hurler de douleur un client ? Quel en est l’intérêt ? Certaines personnes sont plus sensibles que d’autres, mais jamais Gabriel n’as fait pleurer quelqu’un lors d’un tatouage. Quitte à prendre plus de temps, à faire des pauses très régulières, c’était plus plaisait de voir ressortir quelqu’un le sourire aux lèvres que les joues humides de larmes. « C’est assez atypique comme tatouage. J’étais curieux, j’ai fait quelques recherches sur internet pour essayer de comprendre au mieux. » Se renseigner, encore et toujours. Durant sa carrière, le tatoueur avait encré la peau de centaines de personnes avec des motifs très différents les uns des autres. Néanmoins, c’était bien la première fois qu’un type se ramenait en lui présentant de vieilles écritures celtiques. Ecossais bien que son patrimoine génétique vienne d’ailleurs, l’asiatique avait appris le latin lors de son éducation religieuse, mais aussi le vieil anglais par curiosité. En revanche, mis à part quelques insultes tout droit sorties du gaélique et faisant partie du patois Edimbourgeois, il ne connaissait pas vraiment cette langue. « J’ai eu du mal à trouver une traduction pour tout ça. Tu m’as causé deux ou trois nuits d’insomnie avec ton tatouage. »

Essuyant avec patience les premières gouttes d’encre mêlées au sang, Gabe esquisse un sourire « Je suis curieux, je n’aime pas ne pas savoir, ne pas comprendre. J’ai l’habitude de tatouer en anglais, parfois aussi en latin. Mais alors en gaélique et en celte… C’est plus rare. » Les aiguilles n’ont pas le moindre mal à s’enfoncer dans la peau du blond, qui pour le moment reste impassible. « Vu ton prénom, tu dois avoir des origines purement celtiques. C’est pour ça que tu te fais tatouer dans cette langue ? » Cináed. Drôle de prénom, qu’il n’avait jamais entendu avant. Il avait connu un garçon en primaire qui s’appelait Lachlan, mais avait croisé très peu de personnes avec des prénoms si traditionnels au cours de sa vie.

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Cináed L. McIntyre
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MessageSujet: Re: Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed   Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed EmptyMer 18 Nov - 21:58


Gabriel & Cináed


Cineád était pressé. Un paradoxe de sentiments l’envahissait depuis qu’il avait franchi le pas de la porte et ils s’intensifiaient au fur et à mesure que le premier passage de l’aiguille approchait. Il était partagé entre la hâte du travail accompli, du dessin encré à jamais sur sa peau et l’adrénaline de subir le labeur et la douleur exaltante que pouvait provoquer le tatouage. Personne ne pouvait comprendre tant qu’on n’avait pas connu les joies d’un premier tatouage et l’Écossais était formel : cette sensation ne le quittait pas, même après des dizaines de passage. Bien entendu qu’il allait tenir le coup, quitte à serrer les dents et à faire le gros dur. Il avait connu des endroits du corps bien plus sensibles que le bras et il savait d’ores et déjà que la conversation du tatoueur suffirait à lui faire tout oublier. Néanmoins, il ne pouvait pas s’empêcher de laisser ses yeux étudier chaque geste du professionnel, chaque instrument qu’il allait utiliser. L’hygiène avait toujours été le critère principal selon lui et même si le rendez-vous était pris et prêt à être consommé, il ne relâchait jamais son attention. Il examina chacun de ses rituels comme s’il pouvait en apprendre un peu plus sur le personnage. A l’instar des artistes, des peintres, des photographes, de l’humanité même, chaque tatoueur était différent avec ses valeurs et son propre univers. Et Cineád espérait en avoir un avant-goût en lui confiant un tel travail. Il esquissa un bref sourire, s’accordant sur le fait qu’il n’aurait de toute façon pas voulu d’un débutant pour une telle œuvre. Les projets qui mûrissaient longuement avaient besoin d’exécuteurs tout aussi matures. Alors que l’encrage commençait enfin, le blond put enfin se détendre. Le ronronnement de la machine, la sensation de pouvoir sentir le chemin qui était parcouru sur sa peau, allant même jusqu’à pouvoir sentir l’encre prendre sa place dans son épiderme, le bruit ambiant de la boutique et pour finir la voix de Gabriel qui continuait de s’intéresser à ce qu’il était en train d’immortaliser. Tout ça était lénifiant et on put remarquer les traits du visage du trentenaire se détendre et se laisser aller au jeu des questions et réponses. Il adorait ça. « Pour être franc, j’ai toujours rêvé d’un truc qui ne serait compris que par moi, mais j’ai du me rendre à l’évidence. Tout est facilement compréhensible avec internet ou les œuvres historiques de ce pays. » Ce pays, l’Ecosse qui l’avait vu naître et qui le verrait mourir. On avait toujours attribué aux Britanniques un patriotisme plutôt revendiqué et fier et le fils McIntyre n’était pas une exception puisqu’élevé dans une famille traditionnelle. « Mais je suis content de t’avoir tout de même donné un peu de fil à retordre. » Après tout, il fallait bien quelques avantages à être un archiviste.

Cineád résistait à l’envie de jeter un coup d’œil à son bras, ne souhaitant pas perturber le tatoueur dans son travail. Il ne se pardonnerait jamais d’avoir une ligne maladroite parce que sa curiosité avait pris le dessus. Il regardait ainsi devant lui, oscillant entre la salle d’attente et les différents éléments de décoration que le patron avait installés ça et là. Puis on lui posa enfin la question habituelle, concernant son prénom. Un léger rictus apparut sur ses lèvres tandis qu’il disait, parfaitement détendu : « J’aurais dû demander au principal concerné la raison de ce prénom mais je pense qu’il a toujours voulu qu’on se souvienne de nos ancêtres. » Et de ce que ceux-ci avaient apporté au monde et à la connaissance du surnaturel. Il poursuivit, non sans omettre volontairement quelques détails qui auraient pu le mettre en de mauvaises conditions. « Je suis conservateur à la National Gallery. J’ai appris le gaélique et je passe mes journées à décoder de vieux manuscrits poussiéreux. Je crois que j’aime un peu trop mon travail et le mystère de cette culture. » Il marqua une pause, l’aiguille venant de titiller une zone nerveuse qui n’apprécia pas la visite. « Les gens ne prêtent pas assez attention à ce qui les entoure, à ce qui les définit eux et leur avenir. Dans la mythologie celtique, ils trouveraient pourtant pas mal de réponses. » Il leva son regard en direction du tatoueur, peu certain qu’il comprendrait de quoi il parlait d’une façon désinvolte mais qui signifiait beaucoup s’il avait été un des leurs.
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MessageSujet: Re: Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed   Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed EmptyMer 25 Nov - 11:48



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Origines celtiques, empruntes de mystère. Appliqué et concentré dans ses gestes, précis dans son travail, l’asiatique écoute simplement le blond parler. Marquant une pause en sentant un muscle se contracter un peu trop, c’est dans un geste délicat que l’artiste essuie les premières gouttes de sang mêlées à de l’encre. Ne pas faire attention à ce qui les entoure… A ces paroles, Gabriel ne peut s’empêcher d’esquisser un rictus amer. Dix-huit ans. Presque la moitié de sa vie. Il en savait bien plus que le citoyen moyen. Il n’était plus dans l’ignorance la plus totale. Les mythes celtes, il ne s’était pas vraiment penché dessus, préférant étudier la version purement théologique quant aux origines des créatures surnaturelles, mais également l’occultisme. Quand il faut combattre le mal, autant le comprendre le mieux possible. Quitte à parfois se référer à des ouvrages tout sauf catholiques. Rites satanistes, vieilles légendes, sortilèges de magie noire et démonologie. Toutes ces choses-là et même bien plus encore, Gabriel les avait étudiées. Les origines mythiques de la lycanthropie avec le mythe de romulus et rémus, celles du vampirisme avec Caïn. Pour mieux connaître ses ennemis, pour mieux les anéantir. Il ne suffit pas d’avoir assez de sang froid pour tuer lorsqu’on veut être un bon chasseur. Il faut aussi survivre. Rares sont les chasseurs ayant atteint son âge. A l’aube de sa quarantième année, MacGregor est déjà l’un des vétérans de la Congrégation.

Préférant ne pas aborder le sujet tout de suite, le tatoueur hoche la tête « J’ai pas appris le gaélique, et les légendes celtes j’y connaît pas grand-chose. » Légèrement tendu, pensant avoir compris à quel camp appartenais Cináed lorsqu’il avait mentionné la National Gallery, c’est en tentant de ne rien laisser paraître qu’il reprend son travail faisant vrombir sa machine contre le derme de sa victime. « J’ai été adopté quand j’étais tout petit. Je suis né au Vietnam, mais j’en ai aucun souvenir j’ai grandi ici à Edimbourg. Mes parents sont tous les deux écossais de pure souche, donc je suis un gars d’ici même si je sais que j’en ai pas forcément l’air. »
Les récents évènements les mettaient tous les deux dans une fâcheuse situation. Avec la Holy Trinity Congregation qui avait volé le génome souche aux Archivistes… Tous les deux avaient beau être totalement humains, ils ne faisaient pas partie du même camp. Mais après tout, peut-être bien que son client n’était pas un Archiviste, mais un simple rat de bibliothèque à la tête bien remplie. Se raclant la gorge tout en plongeant l’aiguille dans l’encre, voilà qu’il reprend la conversation « On en apprend beaucoup dans la bible aussi, si on sait lire entre les lignes. Comme disait Baudelaire, la plus grande ruse du diable c’est de vous faire croire qu’il n’existe pas. Pas d’ombre sans lumière. Si on croit en dieu, on croit au diable. Et à tout ce qui va avec.»

Se redressant légèrement sur son tabouret et rejetant ses longs cheveux en arrière d’un mouvement de tête, prenant le temps d’observer les première lignes de son tracé, voilà qu’il croise de nouveau le regard pâle de son vis-à-vis « Je suis catholique pratiquant. Alors les vieux livres, et surtout un en particulier, c’est mon truc aussi. Mais avec toutes les réécritures des moines copistes au moyen âge, dur de savoir ce qu’il y avait dans la version d’origine de la bible. J’aime faire quelques recherches sur les origines véritables du Catholicisme. A mon avis, ce qu’on nous apprend maintenant au catéchisme, c’est une version édulcorée et très modifiée du livre saint. »


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Cináed L. McIntyre
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MessageSujet: Re: Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed   Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed EmptyJeu 10 Déc - 22:34


Gabriel & Cináed


Cináed aimait ces omissions, ce mélange indétectable de vérité et de mensonge qui n’avait pourtant rien de manipulateur. Il appréciait seulement pouvoir parler librement, glisser les énigmes là où on aurait pas l’idée d’aller les chercher, sans avoir le sentiment de duper la personne en face. L’ignorance était encore la meilleure des situations et il trouvait les citoyens d’Édimbourg chanceux de pouvoir vivre sans avoir conscience de ce qui les entourait, et sans porter les responsabilités qui accompagnaient ce savoir. Le blond n’avait toujours pas considéré cela comme un privilège, comme un atout qu’il avait par rapport aux autres. Les attaques de vampires ou de loups-garous qui passaient inaperçues dans les médias, justifiées tout à fait rationnellement, ne pouvaient pas faire plus de dégâts. Quand on connaissait la raison d’un drame, il était plus facile de faire un deuil ou de pardonner. C’était plus facile de pardonner au frère qui avait fui la demeure familiale après qu’une morsure n’ait tracé son destin jusqu’à sa mort en le pensant en fugue, en colère contre sa famille plutôt que de s’interroger encore. Pendant des années, Cináed s’était posé des questions sur la mort de son père. Il l’avait ressassée, tournée dans tous les sens, émis des hypothèses, des conclusions mais jusqu’ici aucune n’avait trouvé le chemin de la vérité. C’était des angoisses, des gouffres qui subsistaient dans son être et qu’il essayait peut-être d’exorciser avec l’aiguille sur son bras. Faire saigner son propre corps, ancrer les réalités de ses ancêtres était peut-être finalement le point final, un moyen de refermer le livre définitivement. Il souriait quand Gabriel racontait d’où il venait et quelles étaient les valeurs et les traditions qui l’avaient érigé en tant qu’homme. Il n’était pas différent de lui, ils pouvaient se ressembler par des points essentiels. Toutefois, leurs chemins ne se croiseraient qu’en ces rares croisements, anodins, bénins alors qu’ils auraient pu être du même camp. Ses yeux clairs suivaient le tracé noir qui s’incrustait dans sa peau tandis qu’il en apprenait un peu plus sur l’auteur de la fresque. Seulement quand il évoqua la bible, son attention se concentra presque aussitôt sur son visage comme si le regarder pouvait lui permettre de mieux comprendre. La Bible. Selon Cináed, la Bible était comme le conte qu’on réservait aux enfants. Ces derniers se réfugiaient dans ceux-ci parce qu’ils pensaient pouvoir trouver des réponses, tout en sachant tout au fond d’eux que tout n’était que fiction. En tant que fils d’archiviste, il avait appris très tôt à se méfier de l’écrit sacré qui guidait la vie de bien des citoyens. La Bible brouillait les pistes, dénommait par les mauvais mots, érigeait des symboles qui n’avaient pas lieu d’être dans le monde dans lequel ils vivaient. La Bible était dangereuse pour la science, pour la connaissance, pour l’espoir même. « Bien sûr... » Le murmure échoué, la voix à peine audible. Le visage du client demeurait impassible mais il ressentit le besoin d’activer les doigts du bras qui se faisait tatouer – comme pour vérifier qu’il était toujours là, en pleine possession de ses moyens.

Puis le tatoueur releva la tête et Cináed en profita pour sonder ses prunelles. Etait-il victime de paranoïa ? Son cerveau d’archiviste était-il en train de connecter des liens qui n’auraient pas dû exister ? Au-delà de la douleur désormais submergée de son tatouage, une sensation d’étranglement vint lui prendre à la gorge tandis que son rythme cardiaque s’accéléra légèrement. Les croyants pratiquants pullulaient là dehors, ce qui l’inquiétait, c’était que celui-ci, l’homme en face de lui, fasse des recherches sur les origines de la Bible. Pourquoi donc ? Pourquoi aller creuser ce que l’Histoire avait voulu oublier ? Il ne pouvait pas s’empêcher de répondre : « Je pense qu’il y a une raison pour laquelle on diffuse cette version. Je pense que l’humain est encore fragile et que son esprit doit se construire sur des fondamentaux qui le rassurent. » Préserver leur innocence afin qu’à leur tour, ils ne nourrissent pas une haine des races qui n’étaient pas la leur, au point de les tuer peut-être. « Et tu fais ça lors de ton temps libre ? Ca existe vraiment des endroits pour de telles recherches ? » demanda-t-il l’air désinvolte, tout en reposant sa tête contre le siège. « Qu’est-ce que tu penserais trouver là-dedans qui changerait ta façon de voir les choses ? Tu penses que quelque chose nous manque là maintenant dans notre relation aux autres, au reste du monde ? » Des questions qui pouvaient résulter d’une simple curiosité, d’une simple envie d’avoir une discussion sensiblement intellectuelle avec l’homme qui allait immortaliser sa peau. Mais tous deux savaient désormais que ça n’était plus si futile. Cináed devait savoir.
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MessageSujet: Re: Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed   Show me a man with a tattoo and I'll show you a man with an interesting past. ✞ Gabriel & Cináed Empty

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