Faut-il vous affronter pour comprendre vos réelles intentions ?

with Todd & NoraIl y avait cette voisine. Celle dont Todd se posait sérieusement des questions, parce qu’elle était étrange, et que contrairement au voisin de gauche, ne lui faisait pas face avec des sourires lumineux et des belles paroles.
Il y avait cette voisine bizarre, qui sans savoir pourquoi, aimait à le bousculer, et semblait ne pas l’aimer, sans raison apparente. Todd ne savait pas quoi penser de cette voisine étrange, brin de rousse à l’air rancunier, qui ne cessait de vouloir le faire tomber quand ils se croisaient.

Il faut dire que Todd ne se rappelait plus vraiment comment elle était avant qu’elle ne semble enfin le remarquer, mais pour lui signifier qu’elle ne l’aimait pas. Peut-être qu’avant un quelconque évènement dont il n’avait pas le souvenir, elle l’appréciait, qui sait ?
Dans tous les cas, Todd savait maintenant comment elle s’appelait, parce que cette Nora faisait partie de sa vie, comme le mec qui venait tout le temps au cinéma pour revoir parfois les mêmes films et dont il avait fini par retenir le nom.
Todd y songeait dans sa douche. Il y songeait parce qu’il venait de rentrer du cinéma, et qu’elle l’avait encore croisé, et qu’elle avait encore fait exprès – il en était sûr – de lui rentrer dedans.

Il ne savait pas quoi penser de cette femme. Il ne savait pas s’il l’aimait bien ou pas. Elle était bizarre, un peu comme lui, et au moins, ne lui affichait pas des sourires mièvres remplis d’une gentillesse dont il se serait bien passé.
C’est vrai ça, il l’avait remarqué. En sa présence, il ne se grattait pas tellement, puisque le seul moment où il avait fortement envie de s’arracher la peau, c’est quand leurs deux corps se touchaient, se frôlaient, quand elle le poussait. Mais ce moment était court, puisqu’ensuite venait l’interrogation et la curiosité. De savoir pourquoi. Pourquoi elle lui faisait ça à lui.

Mais Todd était timide. Même avec toute cette tourmente qui le poursuivait, il restait quelqu’un qui n’osait pas aller de l’avant. Il s’imaginait mal à l’affronter. Il avait peur d’avoir envie de se gratter encore.
Sauf que Todd n’était pas patient, et ce fut pour cette raison que le lendemain, quand il rentra du cinéma, éreinté d’avoir vendu des pop corn toute la journée, il lui fit face. Ils étaient dans le même couloir. Elle sortait, il rentrait.
Ses yeux bleus luisaient d’une lumière de défi, presque de provocation. Elle allait sûrement vouloir le bousculer encore, peut-être parce qu’il était sur son chemin.
Mais il osa parler avant qu’elle n’agisse, il osa la prendre de court, parce qu’il savait oser, maintenant.

- Excusez-moi de vous déranger alors que vous êtes entrain de partir, mais je m’interrogeais…

Il vouvoyait, alors qu’il aurait pu la tutoyer, vu le nombre de fois qu’ils se croisaient, que ça soit au niveau du corps ou du regard.

- C’est mon violoncelle qui vous dérange ?

Après tout, Todd y avait réfléchi longuement. Peut-être qu’elle l’entendait pratiquer le violoncelle. Même s’il faisait attention de ne pas être trop bruyant, et d’aller s’amuser avec la musique dans un autre lieu, elle l’avait peut-être déjà entendu, et c’est peut-être cela qui l’avait dérangé.  

- Parce que j’ai remarqué, vous savez, que vous me bousculiez beaucoup.

Il ne songeait même pas à se gratter, Todd ne songeait qu’à savoir. Et il espérait bien obtenir des réponses aujourd’hui. Il ne souriait pas non plus, mais paraissait heureux. Peut-être parce qu’il aimait obtenir des réponses.