(AZELALEM) ϟ new blood

Salem s'étira et d'un mouvement ample des pieds, il écarta sa chaise à roulettes de son bureau. Avec satisfaction il regarda la barre de chargement se remplir petit à petit, comme un sablier. Il se releva et se servit une canette de soda frais. Il leva les yeux vers la fenêtre ouverte sur le bruit de la rue non loin. Même d'ici, reculé dans la cour, dans la pièce la plus lointaine des passages routiers, le bruit des klaxons et de la ville en elle-même était omniprésent. Il préférait sans aucun doute celui plus apaisant du vent dans les arbres, dans le plus pur cliché du loup proche de la nature. Mais il assumait pleinement. Les sons naturels faisaient partie de lui, comme celui orchestré par ses doigts sur le clavier, le cliquetis d'une machine qui démarre, ou les timbres d'un tournevis qui tourne délicatement. Tout cela était intrinsèque à tout son être. Comme deux rouages d'horloge qui s'emboîtent avec perfection, l'homme et la bête n'étaient qu'un, unis et dissolus, entiers et morcelés en miettes d'éternité ancestrale.

« Merde ! J'avais pas vu l'heure ! s'exclama t-il en sursautant. Les aiguilles assassines n'étaient jamais clémentes, refusant de lui octroyer quelques heures en plus sur une journée. Il dormait peu, surtout quand il passait ses nuits sur un dossier, comme cela avait été le cas. Il soupira et après avoir repoussé ses cheveux en arrière, il se mit en quête d'un peu de propreté. Une douche et des vêtements propres plus tard, il ouvrit grand les fenêtres et inspira jusqu'à en avoir mal aux côtes. La fraîcheur de la journée, humide et venteuse, était bienvenue. Il aéra donc quelques minutes avant de ranger. C'est à dire transférer tout le bazar d'une pièce à une autre. Son bordel était inhérent à lui-même - où qu'il passât, il emmenait cet état de désordre constant. Même dans sa nature, exubérante et rieuse, on sentait qu'il n'y avait pas de place pour le rangement. Comme si il avait été conçu sans la case "organisation".

Quand il eut finit, l'endroit ressemblait un peu moins à un champs de bataille, et un peu plus à une chambre d'étudiant. Un comble pour un homme de vingt huit ans. Il alla s'installer dans un de ses fauteuils profonds, et retourna sur son ordinateur, ignorant les canettes vides sur sa table basse, un sweat à capuche qui traînait sur une chaise, et le tapis un peu en bataille. L'endroit continuait d'avoir cette aura étrange de confort douillet. C'était son chez lui, et puis il était certain qu'Azelÿah ne lui en voudrait pas. A la pensée de la jeune femme, il grimaça. Il savait qu'il devait l'aider pour ce qu'elle faisait - c'était un travail ingrat, et elle le faisait pour la meute ... Quand il entendit sonner, il sortit en trombe et dévala l'escalier dans la cour pour aller ouvrir avec son éternel sourire malicieux.

« Bienvenue à vous, Mata Hari, dans mon humble demeure ! plaisanta t-il en lui faisant une révérence. Le caractère d'Azelÿah faisait que beaucoup la craignaient tout en l'admirant, dans la meute. Et si Salem faisait un peu plus attention en sa présence à ne pas dire de bêtises, il l'appréciait trop pour être malhonnête ou pour l'esquiver. « J'espère que tu n'as rien contre les sodas et les gâteaux au miel. Je dois faire les courses s'excusa t-il avec une nouvelle grimace amusée, un peu bêta. Ils montèrent les escaliers qui menaient à chez lui et il laissa Aze entrer. Il la laissa également s'installer et après avoir servi deux canettes de jus de fruit pétillant, puis déposé quelques gâteaux aux épices et au miel, il s'assit dans un fauteuil. Il sourit d'un air satisfait.

« J'ai tout ce que tu m'as demandé, et même bien plus. Un coup d'oeil rapide de ses iris sombres vers l'écran. Le calme plat. Le chargement s'était terminé. Il allongea un bras et fit attention à quitter le terminal. Aucune trace, aucune preuve, nulle part. Merlin venait de frapper à nouveau, et sur l'écran s'affichèrent enfin diverses fenêtres. Toutes à propos d'un certain Erik Dampton. Salem observa Azelÿah, attendant l'avis de l'intéressée. Il renifla discrètement et sourit plus férocement - malgré son allure qui donnait plutôt l'impression d'avoir affaire à une sorcière, Aze portait sur elle ce parfum, cette essence même de la louve, féminine et sauvage. Une odeur qu'appréciait grandement Salem. L'odeur de la famille. Il appréciait énormément la jeune femme, et pour rien au monde il ne l'aurait laissée seule pour ses missions. Si beaucoup avaient peur d'elle pour ce qu'elle devait faire, lui ne la craignait pas. Il la protégeait, derrière son écran, il l'aidait dès qu'il pouvait. Car il n'aurait jamais eu le courage de faire ce qu'elle avait la bravoure de commettre. Et il la respectait plus que quiconque pour cela au sein de la meute, hormis leur alpha. Son sourire s'était adoucit et il haussa les épaules, faussement indifférent, ressemblant plutôt à un gamin qui attend un mot gentil, une caresse, une étincelle de fierté.

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Le lycan avait toujours été admiratif des femmes en général. Bien plus intelligentes et fortes que la plupart des mâles ne pouvaient le croire, la puissance de volonté et de loyauté dont faisaient preuve les femelles de la meute avaient de quoi éveiller son émerveillement enfantin. Et Azelÿah faisait partie de ces êtres capables de beaucoup pour ceux qu'elle aimait et avait juré de protéger. Pour l'alpha, elle aurait tué et serait tuée. Salem veillerait à ce que la seconde option n'arrive pas ; quant à la première, il pouvait proposer son aide pour que cela se fasse dans les meilleures conditions possibles. Parfois, un exécuteur de clan se retrouvait dans le rôle de proie et de victime. Dans ces cas-là, le destin faisait un pied de nez aux rôles institués. Salem refusait que cela arrive - Azelÿah faisait couler le sang, mais il s'agissait du bien du clan.

Le lycanthrope prit les paquets des doigts féminines de la louve et renifla. L'odeur de viande le fit saliver, et il la remercia d'un hochement de tête. Il éclata de rire et roula des yeux, faussement indigné devant les goûts luxueux de la belle. « Madaaame veut du boeuf de kobééé prononça t-il avec un ton volontairement noble et ridicule. En attendant, cuisiner allait être un défi. Qu'il relevait avec plaisir - il aimait prendre des risques. Comme celui de mettre le feu à son appartement, par exemple. Il abandonna Aze devant son ordinateur qui possédait trois écrans et deux tours perfectionnées, et alla déballer le futur repas. Ce n'était pas sorcier normalement - il alluma le four, le fit préchauffer et enfourna pour une cuisson saignante. Il revint vers elle, appâté par l'offrande nutritionnelle comme on récompense une brave bête. Il se voyait plutôt comme le complice dans l'ombre. Le rôle du hacker derrière le trône de l'assassine lui convenait parfaitement. Même si il pouvait se révéler un adversaire redoutable malgré qu'il soit peu musclé comparé à d'autres lycans et qu'il souriait plus qu'il ne grognait, il détestait devoir se battre sans raison évidente. Certes, pour la meute, c'était assez, mais il n'en avait pas le courage. Parfois, il se sentait coupable de laisser à Azelÿah un tel fardeau. Alors il l'aidait. Par amour, par loyauté, par amitié, et pour se défaire un peu de cette culpabilité qui le rongeait comme un acide tenace.

« Je sais, je sais, je suis fabuleux. Une autre preuve ? J'ai pensé à tout et j'ai déjà imprimé les informations. Il prit une pochette coloré sans nom sur son bureau, dessous une assiette sale, et la tendit à Azelÿah avec un sourire malicieux. « Je suis parfait, hm ? Merde, la viande ! Pas si parfait que ça, apparemment. Il laissa Azelÿah se dépêtrer avec son organisation précaire et il finit par servir le repas. La viande était très cuite autour et sanglante en dedans. Les légumes étaient pâteux à force d'avoir cuits dans le jus. Un succès, pour un Salem habitué au charbon nutritionnel. Il servit deux assiettes et en déposa une sur le bureau près de la demoiselle avec un regard qui disait : si tu n'en veux pas, je comprends, mieux vaudrait avaler une souche d'ébola.

« Alors, dis-moi tout. Enfin, je sais ce que j'ai lu. Oui, je lis les informations que je récolte, que veux-tu. Je m'en voudrais de te faire lire des pages et des pages de dossiers inintéressants. Ce Erik Dampton, est-il aussi dangereux que ce que j'ai cru voir ? Une bouchée et une mastication plus tard, il essuyait sa bouche du dos de la main dans un geste purement animal. « De tout temps, l'homme a chassé. Sa nourriture, ses ennemis. Et le voilà encore à essayer de chasser ceux qu'il croit être des ennemis. Le pire, c'est qu'il ne manque pas de ruse, ce Dampton. Une telle stratégie ... L'idée qu'il fasse du mal à leur alpha hérissa Salem qui détourna son regard sombre tacheté d'or lupin. Il n'avait plus faim, il avait plutôt soif. Soif de cette justice, de cette loyauté que devait ressentir elle aussi Azelÿah.

« Comment je peux t'aider ? Tu veux être ma Drôle de dame, et je serais ton Jerry ? Il confondait, ce grand dadais, diverses références plus ou moins culturelles. Mais dans le timbre caverneux de sa voix pouvait se sentir la volonté réelle d'aider la louve. La bête en lui griffait les cornes d'ivoire de sa cage thoracique, afin de faire sortir l'animalité. Le besoin de protéger le clan. Il n'était pas le bras droit pour rien, et il protégerait chaque membre, de l'alpha à l'oméga, par sa vie. « Je voulais regarder aussi ... c'est un peu plus compliqué à obtenir, mais ses antécédents judiciaires. Tu veux que je jette un coup d'oeil ? C'est l'histoire d'une dizaine de minutes, le temps de hacker les services de police et le site de la CIA ou du FBI. Désolé de ne pas y avoir pensé avant, c'était évident, mais j'ai récolté ses dossiers médicaux, les diverses adresses à laquelles il a vécu et surtout des papiers sur ses identités qu'il prend. J'ai assez de preuves pour le faire inculper, si il le faut - images à l'appui. Un mec comme Dampton, soit il avait un casier de mec louche, soit il était blanc comme neige et c'était encore plus louche. Déjà, Salem pianotait sur son clavier à une vitesse folle, ses yeux cernés de fatigue rivés à l'écran alors qu'il vérifiait l'état des ports, les possibilités informatiques et quelles failles générer.

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Salem aimait ça - leurs discussions taquines, leurs petites piques l'un envers l'autre. Tout ces mots l'aidaient à se sentir vivant. La présence de Azelÿah était d'autant plus vivifiante que la jeune femme avait un caractère plutôt opposé au sien. Elle était aussi douce qu'elle pouvait se révéler féroce et implacable. Leur alpha ne craignait rien tant qu'elle était là pour le protéger de ses griffes, même si c'était le rôle de ses ombres de jouer les gardiens. Aze était elle aussi une gardienne, de par le théâtre de meurtres et de vigilance qu'elle mettait en place chaque jour, chaque nuit. Salem désirait l'aider du mieux qu'il pouvait.

« N'exagère pas, voyons marmonna t-il en mangeant sa propre assiette. Il ne trouvait pas cela très bien cuisiné, mais au moins était-ce mangeable. Un succès comparé aux autres plats qu'il avait pu cuisiné par le passé. « Mais je ne dis pas non pour le dessert déclara t-il avec une mine gourmande. « Au cas où tu ne te souviendrais pas, c'est le pudding. Comme si elle avait pu l'oublier ! Il était un grand gaga des choses sucrées, mais si il ne mangeait pas du pudding une fois par jour, il se sentait mal. Presque physiquement. Dire qu'il était addict à cette chose faite de pain, de lait et de raisins secs au rhum, ce n'était pas très loin de la vérité.

La conversation avait pris un tournant plus sérieux, et c'était normal - ils creusaient enfin le véritable sujet de la présence de la jolie brune. Salem, tapotant sur son clavier avec la mine sérieuse, détournant le regard sans pour autant arrêter de pianoter. Il avait appris depuis longtemps l'emplacement de ses touches. Il pouvait écrire dans le noir le plus complet sans regarder l'écran ni même le clavier. « Cet homme est une menace. Autant physique que mentale. C'est un chasseur vicieux assena Salem d'un ton grondant comme une bête aux abois. Ici, nul besoin de voiler le loup. Aze pouvait comprendre l'instinct viscéral, le fauve aux crocs dévoilés, parce qu'elle ressentait sûrement elle aussi cette crainte de perdre leur alpha. Pour Salem, il était leur roi, leur chef, de par sa force et la confiance qu'il faisait naître chez les siens. Il était de la famille, et personne ne le laisserait mourir, surtout pas à cause d'un chasseur stupide - ou, au contraire, pas assez stupide. Les paroles de Aze firent cogner le coeur du lycan dans sa poitrine ; il inspira pour se calmer, et en appuyant sur une touche en lançant le hackage, il se tourna, le nez froncé, vers sa collègue lycane. « Je ... Comment peux t-on faire cela ? Comment peux t-on brûler des gens ? Parce qu'ils ne comprenaient pas. Ils ne savaient pas ce que c'était que de vivre en harmonie avec sa bête intérieure. Ils ne connaissaient pas le bonheur de la nature et de la liberté, de l'acceptation. Salem se hérissa et serra les doigts, ouvrant les poings pour les refermer, nerveusement.

Il avait eu vent de cette affaire. Il avait lu le dossier. Mais que Azelÿah mette des mots réels sur cette sordide histoire avait quelque chose d'horrible, comme si cela rendait les meurtres plus tangibles, plus proches. Salem laissa l'ordinateur quelques minutes à Aze, une fois les informations émises. Il but à son tour le verre de vin ; la moitié pour se calmer, d'une gorgée unique, puis plus calmement, pour apprécier le goût. « Tu as déjà une idée de comment l'attraper ? Un être comme lui, on le piège. Il a l'air de viser uniquement les meutes - les alphas des clans. Il abat le reste en coupant la tête. Dire cela créait un effroi certain chez Salem. « Il faut le tuer, oui. L'éliminer, comme on élimine un fauve trop indépendant sur notre territoire. C'était exactement ça. Salem prit une clé et la brancha sur la télévision. Il l'alluma et une vidéo se mit à tourner, révélant une station service et un homme. Erik Dampton.

« Elle date d'il y a trois jours. Regarde ses mouvements - même malgré la caméra, on peut voir la fluidité de ses gestes. Il risque d'être un adversaire coriace. Il hésita, puis se tourna vers Azelÿah et s'assit à même le tapis, sans aucune étiquette. Il n'y avait pas lieur d'être, ici. « Cette fois, je veux t'accompagner sur le terrain. Pour diverses raisons : il ne voulait pas la laisser risquer seule sa vie ; il voulait savoir ce que cela faisait que d'assister à un meurtre, non pour le plaisir malsain, mais en tant que bras droit ; il voulait régler son compte à ce sadique, ou voir Azelÿah s'en charger, mais d'abord il voulait lui parler. Lui exprimer ses erreurs : vouloir s'en prendre aux loups, aux hommes, aux êtres vivants, pour éradiquer simplement, c'était appeler à la vengeance, mais surtout à la justice implacable de leur clan.

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Salem avait à peine retenu un roulement des yeux vers le ciel en entendant la presqu'injure sortir des lèvres de Aze : du cheese-cake ! Par Fenrir, était-il à ce point bas dans son estime pour qu'on dise de lui qu'il aimait le cheese-cake ? Mais il n'avait pas surenchéri. Parce que, comme il le savait, le devinait, le sentait, leur repas glissait doucement vers la pente plus sérieuse de leur mission.

Le lycan était hérissé, physiquement. Les poils de ses bras étaient électriques, comme parcourus par cette énergie dévorant qui animait le loup. La bête interne rugissait, comme si elle désirait se faufiler entre les côtes derrières lesquelles elle se tapissait. Le loup répondait au chasseur par la même voie de la violence. Et si Salem n'arrivait pas, avec son innocence, à se mettre dans la peau de cet homme, si il ne comprenait pas tout à fait comment on pouvait tuer tant de personne d'une façon aussi douloureuse que par le feu, le loup comprenait, lui. Le loup comprenait la sauvagerie grondante. Il ne saisissait pas pleinement la notion de meurtre, et il hurlait, claquait des crocs dans le vide, en appelant à la vengeance et à la justice, mais surtout en désirant faire tout cela lui-même. Salem musela le loup en fronçant le nez, grattant sa joue d'une main fébrile. « Je n'en suis pas encore à porter un masque. Même si je suis certain que ça m'irait parfaitement gloussa t-il en s'imaginant, tel un justicier des temps modernes, debout sur un rebord de toit cape dans le vent. C'était ridiculement rigolo à se visualiser. Et Aze, comment serait-elle ? En justicière ? Mais son imagination se brida d'elle-même. Ce n'était pas le moment de faire ou de dire n'importe quoi.

La résolution de la vidéo était aussi excellente que possible. Salem avait les yeux rivés sur l'homme, et la bande qui passait, encore et encore, en boucle, comme pour les narguer. Ses yeux flottèrent jusqu'à la compagne de son clan, mouchetés de l'or du loup. Il avait voulu ajouter quelque chose, mais se retint et laissa Aazelÿah finir. Il manqua de s'étrangler, quand à la fin elle sous-entendit ce qu'elle désirait. Les yeux ronds, comme un enfant face à un Mickey à Disneyland retirant sa tête pelucheuse, il ouvrit la bouche, la ferma, la rouvrit, la referma, et finit par enfin dire quelque chose, les joues très rouges, de ce carmin délicat offert aux embarrassés plein de gêne. « Tu-tu veux le ... Mais ne ... Je bégaya t-il avant de toussoter et de se reprendre comme il put. Une main caressant son cou, comme si ce contact pouvait le persuader de ne plus se sentir gêné et le rassurer. « Tu es en train de suggérer de ... De te faire passer pour une prostituée et de l'attirer dans tes filets par l'attrait du sexe ? Sa voix n'avait pas tremblé, mais la dimension dans laquelle ils s'inséraient était nouvelle pour lui. Même si il n'était pas exactement gêné par l'aspect charnel, le loup étant une bête et les lycans n'ayant globalement pas d'embarras avec la nudité ou ce genre de choses, il avait assez peu abordé ce sujet ces derniers temps. Il racla sa gorge et réfléchit sérieusement au problème ; il était bien forcé d'admettre que la solution semblait logique. « Avec ce que l'on sait, et les indices révélés, cette proposition a un taux de réussite de soixante dix neuf pour cent virgule huit. Il avait le cerveau qui chauffait, calculant quels critères donner aux évaluations de cet homme. Un second regard fit plisser les yeux de Salem. « Je te trouverai ses critères de sélection physique. Afin que tu puisses te calquer sur ses préférences mais ... tu étais sérieuse pour le coup des menottes ? Il avait presque l'air penaud, et enfantin. Entendre le mot exciter dans cette situation, dans la bouche de Azelÿah l'avait un peu paniqué, et si il savait qu'il avait été ridicule, le danger de la solution de la louve était palpable.

« Ca sera très dangereux. Se rapprocher de lui, ça veut dire lui laisser l'occasion d'entrer dans ta sphère aussi. Il va falloir calculer chaque danger, chaque potentialité ... Et en disant cela il eut un petit sourire. Ironiquement, les calculs, les probabilités et tout ce qui touchait à cela était son grand dada. L'informatique n'était après tout, souvent, qu'une suite de probabilités qu'on définissait. Il haussa une épaule et resservit le vin, qui emplissait la pièce d'une odeur suave, couplée à celle de la viande. Il servit d'ailleurs le dernier morceau de viande à Aze, en signe de confiance et d'amitié. Il connaissait aussi les penchants gourmands de la belle, et lui-même n'avait plus faim.

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L'idée même d'halloween lui était sortie de l'esprit. Les paroles de la louve lui remirent les idées en place et Salem se permit une nouvelle grimace. Lui, habillé en super-héros ? Ce n'était pas exactement une bonne idée.  « Je ne suis pas sûr que les collants soient ce qui me sied le mieux rétorqua t-il avec son cynisme habituel. Rien que de s'imaginer en tenue moulante, à se tenir debout dans un coin d'une quelconque soirée, à boire pour oublier qu'il était loin de ses ordinateurs et un peu trop en société à son goût, ce n'était pas la définition exacte d'amusement pour le bras droit. « Quelle sera la tenue de ma louve préférée ? Si tu tiens tant que ça à me voir en super-héros, il est de bon aloi que tu fasses la super-héroïne. L'acolyte s'esclaffa t-il pour ennuyer la jolie louve. Ils se taquinaient à la manière de frère et soeur, et il adorait cette relation pour la fraîcheur qu'elle possédait, malgré la maturité de certains sujets qu'ils abordaient.

Peut-être même trop mature, des fois. La sexualité n'était pas une chose que Salem dénigrait. Il était un loup, la pudeur avait été effacée de sa vie il y avait longtemps, et il n'était pas prude ou innocent sur ces choses là. Mais en parler de façon aussi légère, en songeant aux risques, alors que sa partie imaginative commençait à parer Aze de cuir et de menottes ... Merci, mais non merci. Non pas qu'elle ne soit pas désirable, mais en ce qui concernait Salem, jamais il ne verrait en Aze une partenaire potentielle. Il l'aimait véritablement, comme on aime un membre de sa famille. « Si, je ... je suppose marmonna t-il, toujours embarrassé. Le sourire qu'elle portait sur ses lèvres était celui d'un fauve, et il se rasséréna à cette vue. Elle savait se défendre, après tout. « Cela m'ennuie de te laisser porter le chapeau. Tu prendras tous les risques ... Ce n'était pas sa place, que celle de tuer, mais il n'en était pas moins bougon à l'idée de la laisser faire tout le boulot. Le discours qui s'ensuivit était encore plus gênant, si c'était possible. Salem se mit à battre l'air de ses mains, agité et nerveux. « Wow, wow ! On est vraiment en train de parler de ça ? Il grogna un peu et haussa les épaules, s'enfonçant dans son fauteuil, le regard ne lâchant pas Aze.

« T'es une femme. Tu es ... Belle. Séduisante, oui. Je pense qu'un seul regard de ta part pourrait déjà l'attirer. Mais ... Si l'on se concentre sur les vidéos et les connaissances que l'on a du sujet ... Oui. Il va te falloir changer totalement de look. Tu es bonne pour une robe seconde peau bien courte et des talons de trente centimètres fit-il en riant, en imaginant sans peine Aze brûler tout ce déguisement après coup. « Tant que tu ne me demandes pas de t'accompagner en diffusant la musique de Pretty Woman derrière toi, ça me va. La question de Aze le surprit et il écarquilla les yeux, un rictus aux lèvres. « Non. Jamais. Il hésita puis, dans un souffle, osa demander : « Y'en a vraiment que ça excite, d'être attaché ? Il imaginait très mal le plaisir qu'on pouvait y prendre. Il se sentirait non pas impuissant mais assoiffé de liberté. Il aimait contrôler et se sentir libre. Salem ne pourrait jamais supporter d'être attaché. Il esquiva les pensées qui commençaient de nouveau à glisser sur un terrain dangereux, et toussota, raclant sa gorge pour mieux avaler d'un trait son verre de vin.

Salem se gratta la joue et chercha un plan B. « Si on ne peut l'avoir par le sexe et l'attrait séducteur ... Il faut nous placer sur un autre terrain où nous aurons l'avantage. Il faut profiter qu'il soit seul ou ... Peut-être plutôt dans une foule ? L'anonymat, la masse grouillante devrait l'empêcher de répliquer, si l'on fait quoi que ce soit ... Mais cela voudrait dire que nous devrions réussir à le tuer sous le regard des autre ... Peut-être à un moment où l'attention est déviée, tu sais ? Pendant un discours, un feu d'artifice, quand les regards sont ailleurs ... Il cherchait tant bien que mal, énonçant à voix haute ce qui lui passait par la tête, que ce soit intelligent ou non d'ailleurs.

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