EVENT SPECIAL ST VALENTIN ✝ Couple 6

Le grand soir était enfin arrivé. Quand elle avait vu l’annonce pour cette soirée, elle avait sauté sur l’occasion. Elle avait passé les cinq derniers 14 févriers seule chez elle, et elle tenait à remédier à cela cette année, même si dans l’absolu, un blind date n’est pas nécessairement ce qu’elle qualifierait de soirée idéale pour la Saint-Valentin. Au moins, elle ferait quelque chose, et qui sait, peut-être que cela déboucherait sur autre chose. Peut-être qu’après, elle ne serait plus seule en ce jour fatidique. Bon, ne rêvons pas trop non plus, hein, mais tout peut arriver. C’est donc avec un mélange d’appréhension et d’excitation qu’elle s’était levée ce matin là. L’avantage que ce soit un dimanche, c’est qu’elle avait toute la journée pour se préparer tranquillement, sans stress. Le côté moins sympa, c’est que cela laissait la place à la rêverie, et donc aussi à l’inquiétude qui faisait inévitablement surface à mesure que la journée avançait. Elle passa donc la matinée à se détendre, à lire, à trainer dans le jardin, ce genre de choses. Puis l’après midi fut consacrée à la préparation de la soirée. Pour une fois, elle y prit du plaisir. Pour une fois, ce n’était pas une soirée pour le boulot. Et surtout, pour une fois, elle n’avait pas besoin de se mettre en mode soirée mondaine. C’était même déconseillé, et c’est une des raisons qui l’avaient convaincue de se lancer dans l’aventure. Un bon bain chaud et de la musique achevèrent de la détendre, puis il fallu s’attaquer à la tenue et au maquillage. Et cette fois, elle pouvait s’habiller comme elle en avait envie, histoire de ressembler à elle-même et pas à une de ces greluches coincées qu’elle devait toujours imiter, à son plus grand désespoir. Restait juste à espérer que son partenaire d’un soir aimait l’originalité, sinon, il en serait pour ses frais.

Son choix se porta donc sur une t-shirt Snoopy, une jupe longue bleue un peu estivale, avec des collants assortis, un gilet gris, on est en hiver tout de même, bracelets, bague, collier … Ah oui, et les lunettes. Elle ne les portait pas très souvent, mais là, elle avait envie. Elle s’attacha les cheveux, histoire qu’ils ne partent pas dans tout les sens, et se maquilla légèrement. Parfait. Elle jeta un œil dans le miroir, et satisfaite de ce qu’elle y vit, elle enfila ses chaussures, s’empara de sa veste et de son sac, et se mit en route. Le restaurant n’était pas tout près, mais comme à son habitude, elle choisit de s’y rendre en marchant. Elle avait largement le temps, de toute manière. Plus elle avançait, moins elle se sentait inquiète. Un peu comme quand elle avait une conférence à donner. Elle stressait longtemps à l’avance, mais plus ça s’approchait, plus elle était zen. Tant mieux, ça lui éviterait de passer pour une midinette. Dans ce genre d’occasion, elle préférait tout de même être en contrôle d’elle-même, et il faut bien en convenir, ce n’était pas une mince affaire. Elle arriva au restaurant quelques minutes après vingt heures. Le rouge de la salle lui piqua les yeux, mais elle s’y fit bien vite. A priori, elle n’était pas la dernière. Tant mieux. Elle se présenta à l’accueil et se laissa mener vers une table encore vide. Le carton indiquait Mirela & Iorek. Iorek … Le nom ne lui disait rien. Tant mieux, au fond, rencontrer un parfait inconnu était nécessairement plus excitant.

Mirela n’eut pas à attendre très longtemps avant de pouvoir mettre un visage sur le nom de son rendez vous du soir. Lorsqu’elle le vit approcher, elle leva un sourcil. Elle l’avait déjà vu quelque part, elle en était certaine. Mais où ? La Burns Night. Evidemment. Comment l’oublier ? Elle l’avait vu se transformer en ours. En ours, quoi. Vous pensez bien que ça l’avais marqué. Bien entendu, elle n’avait à ce moment là pas eu le temps de lui accorder plus d’attention que ça, mais il était plutôt pas mal, dans l’absolu. Moins imposant qu’en ours blanc, c’est certain. Il avait même l’air plutôt timide. Bien habillé, mais plutôt dans le genre décontracté. Tant mieux, elle avait eu sa dose de pingouins guidés ces derniers temps. Il était définitivement timide, c’était trop mignon. Il butait un peu sur les mots et ne savait pas quoi faire de ses mains. Mirela lui offrit un sourire qu’elle voulait rassurant. Elle remarqua aussi qu’il n’avait pas l’air de l’avoir reconnu. C’est vrai aussi qu’elle n’était pas tout a fait attifé de la même manière, et dans son cas, ça pouvait jouer. Enchanté, Iorek. Mirela Šestić. Je viens d’arriver, ne vous en faites pas.

Lorsqu'il lui avoua être novice dans ce genre de choses, elle sourit. C'était son cas à elle aussi, mais apparement, elle gérait le stress un peu mieux. Il avait l'air d'un gosse, c'était adorable. Il la complimenta sur son t-shirt. Sincère ou simple politesse ? Elle décida qu'il avait l'air sincère. Merci. J'ai eu ma dose de tenues de soirée pour l'année, alors j'ai fait plus soft. C'est la première fois pour moi aussi, vous en faites pas, ça va bien se passer. Après un instant, elle ajouta : On pourrait peut-être se tutoyer ? On s'est déjà rencontré, mais j'ai l'impression que vous ne me replacez pas. Je vous comprends en même temps, j'aimerais bien oublier cette soirée aussi. On s'est vus à la Burns Night. Elle ne parla pas du fait qu'elle l'avait vu se transformer, après tout, on était pas tout à fait à l'abri des oreilles indiscrètes ici.

Elle se demanda tout de même si elle avait bien fait de mentionner la soirée tragique dont ils étaient rescapés. Cela ne pouvait amener que de mauvais souvenirs, et ce n'était pas l'ambiance. Mais au moins il pourrait la replacer et ils pourraient partir de là. Ils avaient toute la soirée pour parler d'autre chose, ou au pire pour boire jusqu'à l'oubli. Même si dans l'absolu, Lela préférait la première option. L'alcool, c'était pas trop son truc. Passons à un autre sujet. Ils se sont lâchés sur la déco, franchement, ça m'a fait mal aux yeux en entrant, pas toi ? En même temps, fallait s'y attendre. Se rendant compte qu'elle recommençait à blablater, elle préféra le prévenir : Tu m'excuseras, hein, mais j'ai une sale tendance à parler tout le temps, et souvent pour ne rien dire, alors si je te soule, hésite pas à me le dire, je t'en voudrais pas. Elle avait l'habitude aussi. Tu fais quoi dans la vie, sinon ?

Le pauve Iorek avait l'air au bord de la crise de nerfs. Mirela espérait tout de même qu'il parviendrait à se détendre, ou la soirée serait longue pour lui. Mais ce n'était que le début, laissons lui un peu de temps. Au moins, il n'hésitais pas à parler, c'est déjà ça. Elle aurait tout à fait été en mesure de tenir la conversation toute seule, sans prblème, mais à la Saint-Valentin, c'est pas franchement l'idéal. Ca te vas plutôt bien comme style, je trouve. Mais je compatis, j'aime pas porter des vêtements guindés comme ça. D'où ma tenue. Elle sourit en le voyant essayer de la replacer dans ses souvenirs de la fameuse soirée que tout le monde préfèrerais oublier. Non, je crois pas qu'on se soit parlé. En même temps, c'était pas trop la préoccupation du moment. Mais tu étais pas vraiment ratable, je risquais pas de t'oublier. En même temps, voilà quoi. Un ours blanc, t'en croisais pas souvent dans les soirées mondaines. Si ? En tout cas, pas dans celle que Mirela devaient se farcir pour le boulot. Ce serait tellement plus sympa s'il y avait ce genre de choses. Enfin, pas trop non plus, hein, pas de Burns Night bis. Juste un peu d'animation, histoire de détendre l'atmosphère de ces interminables mascarades. A propos de détente, Iorek avait encore l'air un peu gêné, mais déjà moins qu'au début. Bon, c'est plutôt bien parti du coup.

Oui, tu as sûrement raison ... Même si j'ai du mal à concevoir qu'on puisse aimer ça. Son évocation de la mode la fit sourire. Sur ce point là, ils allaient bien s'entendre. Oh, me parles pas de la mode. J'ai jamais compris l'intérêt de faire comme tout le monde. C'est tellement plus intéressant de faire tout le contraire. Enfin, à mon sens. C'est vrai que du coup, je passe pas mal pour une excentrique, mais c'est pas ça qui va me déranger. Décidément, il était vraiment différent en humain. L'ours faisait presque peur. L'humain, t'avais juste envie de lui faire un gros câlin - chaste hein, du moins pour l'instant – tellement il était cute. Tant mieux, parce qu'avec moi tu vas être servi. Un vrai moulin à paroles, en général ça soule tout le monde. Ce qui me donne encore plus envie de continer, la plupart du temps. La question sur le travail le fit changer d'attitude. Tout de suite, il avait l'air plus confiant. C'est bon signe ça, c'est probablement qu'il aime son job. Zoologiste. La classe, ça devait être passionnant comme boulot. Wow, ça doit être un boulot de dingue ! Mais ça a l'air super intéressant. Quelque chose lui disait qu'il était spécialisé dans les ours, mais chut ! Moi je suis enseignante et chercheuse en histoire, à l'université. Au contact d'un autre genre d'animal : l'étudiant. Assez fascinant comme bestiole, quand on y réfléchit. Elle se moquait, mais elle les aimait bien, au fond, ses étudiants. Et puis, sans eux, son travail n'aurait pas beaucoup de sens. Et sinon, tu viens d'où toi ? C'est pas écossais comme nom, ça, Iorek, si ?