Dieu a manqué d'inspiration pour toi. Désolé. (luke)

âge: 30ans. lieu de naissance et origines: USA, Nouvelle Orléans. Son père est Londonien, sa mère libanaise. Donc ses origines, il les a pioché dans un sac poubelle. statut civil: célibataire frustré. profession: ancien caméraman, actuellement ivrogne. famille: Wilson : plus banal, tu meurs. Un peu comme Luke, au fond, l'ennui en flacon. Une famille parmi tant d'autres, un peu malheureuse de ne pas réussir à avoir d'enfants. Quand les médecins ont proposé une solution miracle, ça a fait tilt dans les éponges qui leurs servaient de cerveau. Et ça a finalement donné Luke. Malheureusement. dons particuliers: Régénérescence cellulaire. Ça ne lui a pas appris la prudence. avez-vous un moniteur: Non, Luke fait partie de ceux qu'on a perdu de vue. Peut-être qu'il était simplement cruellement inintéressant... qu'est-ce que votre personnage sait de sa nature: Il sait qu'il est bizarre, ça le rend fou. Il ne sait pas d'où cela vient, il ne sait pas comment s'en débarrasser. C'est comme une malédiction, comme s'il était constamment dans l’œil du cyclone, entouré d'un désastre qui menacerait de le frapper, écroulé sous la peur à longueur de temps. quelle est votre réputation à edimbourg: Luke n'est rien de plus qu'un nouvel arrivant, une bonne proie, à priori. Généralement, on l'évite car il est, la plupart du temps, saoul et violent. Il jure devant les gosses, crache sur le trottoir. C'est un mec détruit, visiblement dépassé par ses expériences, noyé dans sa vie et imbibé d'alcools et de drogues. Pas fréquentable, c'est évident. Il raconte toujours des horreurs aux bars, des choses qu'il a vu ; on le croit rarement. On l'écoute rarement, en fait. C'est juste un raté, qui fait attention aux ratés avec tout ce qui se passe ?  traits de caractère: ivre, rien ne l'arrête, absolument tout lui semble à portée de main. Il semble oublier son histoire, devenir quelqu'un d'autre, devenir celui qu'il a toujours voulu être. Mais il est juste saoul. Il devient violent et vulgaire, comme il peut s'avérer être d'une attractivité à toute épreuve. Tout dépend quelle veine est bouchée par l'alcool. raté, c'est ce qu'il s'imagine. Clairement, Dieu a manqué d'inspiration au moment de la création de Luke ; il a bâclé le travail, a saupoudré le tout d'un peu d'emmerdes pour donner de la forme, mais ça a foiré aussi. Toute sa vie, il a empilé ses expériences les unes sur les autres jusqu'à faire une pyramide. Puis il a pris une bouteille, l'a vidé et a donné un grand coup de pied dedans. Et maintenant ? Il reste plus rien. courageux, ça, ça ne lui a jamais fait défaut. Quitte à mettre les autres en périls, il est prêt à tout quand il s'agit de braver le danger. Voilà pourquoi il a fait des conneries... et avec sa imbécilité maladive, il a souvent confondu courage et stupidité. passionné, ça, c'était avant. Mais là encore, il n'a pas su couver cette précieuse qualité. Il a préféré balancer des bombes émotionnelles ci et là, c'était sa façon de vivre, et de pleurer après en disant que la vie lui en voulait. attachant, malgré tout. Quand il n'est pas ivre, se rappelle à la vie l'âme d'un homme qu'on a abimé. Un homme qui tend la main, qui a arrêté de pleurer par fierté mais qui, paradoxalement, n'est prêt à rien pour se sortir de sa situation. crédits: krystiagathe.tumblr. groupe: fear no evil.

 

✝ MAMAN. Ses parents ont tout fait pour avoir un gosse, acceptant même un traitement spécifique proposé par un hôpital à la Nouvelle Orléans. Ce qu'ils n'avaient pas compris à l'époque, c'est qu'un gosse, ça s'élève mieux à deux, et ça grandi mieux quand on le couve d'amour. Il a suffit de six ans et d'un Luke un peu difficile pour que les deux tourtereaux divorcent. Monsieur laisse l'enfant à Madame, Madame est désespérée et Luke finit par s'échapper du contrôle parental. A l'adolescence, les choses se compliquent : il enchaîne les échecs à l'école, ses fréquentations deviennent mauvaises et, pour couronner le tout, il se découvre un don qui vient enflammer le tout. Un don qui semble le rendre indestructible... A cette révélation, cette tentation diabolique qui vient soudainement illuminer sa vie, Luke répond par un besoin de pouvoir exubérant. Il ne craint pas les conflits, pas les bagarres. Cet événement paranormal, il le comprend comme un jeu dément, tout au plus une capacité rare mais naturelle. Il est juste con. Quelque chose déconne dans sa tête, quelque chose qui danse un joli tango avec son égocentrisme. Et si ce pouvoir semble lui apporter un peu de réconfort, la vie et la justice finissent par se rappeler à lui. Sa vie de lycéen adulé et populaire s'écroule à l'annonce du cancer de sa mère. Elle décède lorsqu'il n'a que dix sept ans.  ✝ PAIE TA VIE. Cette tragédie est comme sa propre mort. Soudainement, il semble ouvrir les yeux, rencontrer la vie. Après une année perdue à tenter de se sortir de sa dépression, à tenter de vivre avec le souvenir de sa mère et tous ces instants qu'il a manqué à ses côtés (tous ces instants qu'il a préféré passer loin d'elle, dans la rue, avec ses potes pourris jusqu'à la moelle)... et ce fléau, ce pouvoir, ce poids amer qui aurait pu la sauver, si seulement il avait pu lui en donner un petit bout. Si seulement il n'était pas lui, si seulement il avait vu plus tôt. A partir de ce jour, il porte en lui la culpabilité, et vivre est difficile, malgré l'aide de son père qui semble partager les mêmes regrets. ✝ RENOUVEAU. Il décroche tant bien que mal son bac malgré ses notes affreuses. Pourtant, l'avenir n'a rien de brillant pour lui. Même s'il tente désespérément de sortir la tête de l'eau et d'échapper à ses déboires, ses années à échapper à ses responsabilités laissent des traces. Il finit par décrocher un boulot d’assistant miteux dans une salle de spectacles, travaillant comme technicien, apportant parfois des cafés aux grosses gueules capricieuses de passage, réparant ci et là quelques engins, traînant jusqu'à en perdre son souffle le matériel hors de prix, priant que sa maladresse ne le prive pas de ce travail qu'il peine à garder malgré tous ses efforts. Finalement, son investissement est repéré, et surtout, son endurance admirée. Malgré ses travers sociaux et son air triste, Luke semble retrouver un peu de confort social. C'est sur ce plateau qu'il rencontre un caméraman dont les récits font voyager notre mutant ; avec l'aide de l'homme, il parvient à s'installer à ses côtés pour une formation. La tâche n'est pas si difficile, Luke s'y complaît. Il souffre de son manque de culture, mais il n'a pas tellement besoin d'ouvrir la bouche, et les nombreux lieux où il doit se déplacer et reportages qu'il tourne lui font, tour à tour, découvrir la complexité de la société, les beautés du monde et les laideurs humaines. Ces découvertes éveillent en lui une âme de révolté. Montant peu à peu sur l'échelle du métier, il découvre de plus en plus les mensonges et les vilénies qui se trament. Luke n'a jamais été un garçon sage et docile, et bien que les événements de sa vie aient calmés son égo, il restait un preneur de risques. Son besoin de dénoncer les maux du monde était devenue plus forte que tout. ✝ MASSACHUSETTS. Il tente de donner un peu de couleur à sa vie d'une morosité affligeante. Son don, il le refoule au plus profond de lui-même, sa seule utilité étant de lui offrir la chance d'échapper aux maladies et aux conséquences des accidents. Heureux en ménage, bientôt marié, bientôt la nouvelle maison, on pense déjà aux enfants qu'on pourrait adopter ; faudrait-il acheter un animal de compagnie pour aider le bambin dans sa vie affective ? On rêve. Tout se déroule dans un bonheur banal, un quotidien que Luke ne supporte pas. Il sait qu'il est fait pour autre chose. Il sait qu'il a reçu une malédiction (ou un don) et qu'il ne peut pas se contenter de compter les jours. Alors il finit par mettre sa vie en standby, et il part pour sa plus grande aventure. Il endosse le rôle d'un caméraman de guerre, fait ses valises pour la Syrie et, accompagné de son équipe, s'apprête à vivre ce qui sera la seconde plus grande tragédie de sa vie. ✝ BIENVENUE SUR TERRE. Les horreurs qu'il a filmé, il ne les a pas toutes vues à travers sa caméra. Il y a certaines monstruosités qui lui ont crevées la rétine, sans aucune pitié. Rien, absolument rien ne pouvait retenir son cœur de saigner et ses larmes enflaient ses yeux à longueur de journée, régénération cellulaire ou pas. Son passé de voyou et la brutalité dont il pouvait faire preuve ne le protégeaient pas des cruautés qu'il pouvait voir. En vrai, aux premières loges : cet enfant qui est mort en implorant Dieu de le mener à sa mère... Luke ne s'en est jamais remis. Ces visions l'ont ramené à sa vie ; sa vie marquée par une particularité qu'il cachait, mais pourtant si simple. Son bonheur, il n'était pas sûr de réussir à le couver, maintenant qu'il avait vu ce dont l'Homme était véritablement capable. Peut-être, qu'intérieurement, il espérait qu'en venant ici, il découvrirait une autre vérité. Qu'en réalité, les médias, lui en rajoutaient toujours un peu. C'était faux. Ils enlevaient tout, ils avalaient l'essentiel. Ils cachaient cet enfant qui ne vivra jamais sa vie ; jamais les premiers sourires d'un amour, jamais le premier cri de son enfant. Jamais, puisqu'il est mort ici, sur cette terre sanglante. La colère qui faisait bouillonner son être poussa Luke à l'une de ses plus grandes erreurs : le coup de leur vie. Malgré le refus de la plupart de ses collègues, il persuada les autres de filmer l'action au plus près du feu. Tout montrer, aucune censure, ne cacher aucune balle, aucune larme. Alors, un soir, ils se sont immiscés au cœur d'un conflit, s'infiltrant lors d'une attaque américaine. Les balles tuaient tout le monde, civils y compris : femmes, enfants, hommes désarmés. Il n'y avait ni méchants, ni bons, juste des bouts de chaire suants les larmes. Luke aussi braquait son arme : sa caméra dont l'écran était humide d'horreurs. En voyant l'équipe, les soldats (leur propre camp, bande d'enfoirés), ouvrirent le feu sur le tournage. Seul Luke a survécu, sauvé de justesse par son don. ✝ TOUT EST FINI. C'est un médecin, éberlué par le diagnostique qui l'a envoyé à Édimbourg. Au stade où en était Luke, littéralement écroulé (autant par la mort de ses collègues - par sa faute - que par son séjour en enfer), tout lui était égal. On pouvait bien faire de lui un cobaye, le traiter comme un monstre, il s'était rendu compte que plus rien n'avait d'importance. Il alla donna un dernier coup de pied à sa vie, devenant la présente épave en traînant encore dans les rues du Massachusetts, où il habitait jadis avec son compagnon. Rien, plus rien. Il passait son temps à ne plus exister, se servant de la boisson et des drogues pour disparaître. Horreurs qui ne parvenaient pas même à le détruire, puisque les cellules ne tardaient jamais à se régénérer. Il était un éternel ivrogne, mais il avait toujours une bonne gueule et rarement la gueule de bois. C'est finalement sous les suppliques de son ancien Docteur de guerre qu'il rejoignit l’écosse, sans aucun but précis, hormis continuer à vivre car il était trop lâche pour se tirer une balle. ✝ SON DON. Il a toujours gardé le secret jalousement pour lui. Personne ne devait savoir, personne ne devait y toucher. Il avait bien trop peur qu'on le traite de mutant et qu'on se mette à le charcuter de partout. Après la mort de sa mère, cette faculté est devenue son plus grand fardeau. Il n'en abusait jamais, ne l'utilisait pas. Il a appris à vivre avec au jour le jour, comme s'il était né avec six doigts à une main et que cette particularité avait fini par faire partie de lui-même. Savoir qu'il ne peut partager ce don, qu'il ne peut que se régénérer aussi égoïstement sans pouvoir aider les autres lui fait penser que cela est une malédiction, une forme de tentation, une marque du Diable qu'il doit cacher et combattre pour mériter sa place au paradis. ✝ L'ALCOOL. Il le déteste comme sa propre personne. Il le gerbe à longueur de journée puis apaise sa soif la minute d'après. Le matin, à jeu ; la bouteille de whisky posée sur sa table de nuit. Il n'arrête plus. Luke a toujours eu un penchant pour la boisson, consommant régulièrement de l'alcool et en abusant aux grandes occasions... Mais depuis son accident, depuis l'accident du monde il ne trouve le réconfort que dans son coma de conscience. Perdre la tête, arrêter d'être soi-même, c'est tout ce qu'il lui reste. (Il n'hésite pas à agrémenter le tout par toutes sortes de drogues). ✝ ÉDIMBOURG. Luke est totalement étranger à ce monde. Littéralement, à ce monde. Il est une personne terre-à-terre. Quand il regarde un bon film d'horreur, il n'a pas peur puisqu'il est convaincu de la fiction, de l'irréalité de ce qu'il voit. Jusqu'ici, il a toujours été persuadé que Dracula était un best-seller et qu'il s'était depuis peu métamorphosé en Edward Cullen pour le besoin hormonal des jeunes minettes. Son arrivée à Édimbourg et sa placidité quant aux rumeurs laissait les croyants perplexes. Pourtant, il a déjà été confronté aux bêtes de ce royaume... Mais a toujours mis ces visions sur le compte de l'alcool. Il n'a toujours pas contacté le médecin-chercheur vers qui son Médecin de Guerre l'a envoyé. Malgré son désespoir, il a toujours peur d'avouer son secret... Pourtant, certaines personnes semblent le garder à l’œil depuis son arrivée... ✝ TRISTAN. Son voisin. Son beau voisin. Son très beau voisin. Au départ, il était ce fantasme qu'on rêve de croiser dans l'ascenseur pour quelques frissons et pensées frivoles... Mais Tristan est rapidement devenu une obsession. Toute excuse était valable pour le croiser, le voir de loin ou l'énoncer dans une discussion. La rencontre entre eux d'eux a tardé, du fait de l'extrême maladresse de Luke (comment articuler deux mots devant cet homme qui lui faisait tellement d'effet ?). Il pense bien lui plaire, mais la séduction ne le réussit pas. Ses mains tremblent ; il n'ose pas s'approcher de lui car il a l'haleine d'un alcoolique. Il transpire l'amer liquide par tous les pores. Pour se donner une chance avec Luke, il semble prêt à faire des concisions... Comme si la rencontre avec cette homme lui avait donné une chance de revivre. (C'est ce qu'on appelle, avec toute la banalité d'une monde, un coup de foudre).

 

La tombe de sa mère le réduisait toujours au silence. Pas physiquement, mais intérieurement, plutôt. Quelque chose en lui se taisait, par peur ou par respect. Ou par terreur. Terreur de penser quelque chose qu’il ne devrait pas. Il essayait de s’assommer émotionnellement par tous les moyens du bord, mais il finissait régulièrement en larmes, pleurant sans faire de bruit pour ne pas déranger la paix des lieux. Parfois, quelques sanglots venaient accompagner les pas mystérieux de quelques venus ; un peu d’affliction qui s’échappait de cet affreux contrôle. Contrôle de sa peine. Il s’était promis de ne jamais arriver ivre, de ne jamais avoir l’esprit embrumé. Jamais, jamais il ne pourrait rendre visite à sa mère en étant une épave. Alors mentir un peu, faire semblant, beaucoup, le temps de quelques instants au pied de ses cendres, il pouvait bien le faire ?

Tous ces moments perdus, à errer dans sa propre inconscience (là, il pleurait généralement. Il pleurait parce qu’il se rendait compte que plus jamais il ne pourrait vivre ces quotidiens cons avec sa mère ; son inquiétude lorsqu’il rentrait tard, ses remarques lorsqu’il ne prenait pas soin de lui, ces questions parfois indiscrètes qu’elle lui posait : « et tu as une copine ? » un peu timide, un peu gênée.) Il tuerait pour pouvoir ramener sa mère, pour pouvoir échapper au glacial marbre de sa tombe. Pour sentir une fois – rien qu’une fois, pitié – la chaleur réconfortante de ses bras. Ce n’est qu’à sa mort que Luke s’est rendu compte qu’elle constituait toutes les constellations de sa vie. Comment avait-il pu laisser passer tout ça ?

Ne pas voir les symptômes ? Ne pas demander ? Ne pas mourir d’inquiétude ? Pourquoi est-ce qu’un immense fracas ne l’a pas réveillé de son coma d’idioties, pourquoi est-ce que le destin ne lui a pas laissé une chance de se réveiller… Plus tôt ? Lorsque la santé de Maman s’est si tragiquement dégradée, sa mort était proche. C’est à ce moment là que Luke a grandit. A ce moment là qu’il a regardé la vie et vu la mort. Dans les yeux de sa mère.

Et depuis, il sent son regard partout. Ce monstrueux regard, glaciale évidence : malgré tous ses défauts, elle était heureuse de voir son visage pour la dernière fois. Parce qu’il était tout, et qu’elle n’allait être plus rien. Elle est presque partie avec le sourire.

Tout, tout s’est arrêté. Absolument tout a foutu le camp. Jamais il n’oubliera son regard, jamais il ne fermera les yeux sans le voir à travers ses paupières. Jamais il ne se lèvera le matin sans espérer la voir au pied de son lit.

Alors il vient se recueillir sur sa tombe parce que c’est tout ce qu’il lui reste : son propre reflet dans le marbre luisant, indiquant le nom et les dates. Et aucune réponse. Aucune chaleur. Juste des larmes d’un cœur hystérique, abandonné et dévoré par la culpabilité.

Et le manque – bon Dieu, le manque. Parce que tout s’est passé hier. Elle est morte hier, tous les jours. L’intensité dans son cœur n’a jamais fané une seule pétale, elle lui alourdit la poitrine de manière impitoyable ; crève son souffle. Maman. Luke n’a jamais grandi depuis ce jour, il n’a jamais avancé.

Ce tragique événement a pourtant tout chamboulé. C’est cela qui a réveillé Luke du coma de son existence. C’est cela qui l’a jeté dehors, forcé à vivre malgré les événements. Chaque jour, son corps changeait pour donner naissance à un adulte : il devenait un adulte. Avec toutes les responsabilités que cette métamorphose engendrait.

Peut-être que son choix de devenir caméraman n’était pas anodin. Le besoin de ne pas voir réellement le monde, de l’apercevoir à travers un objectif. Continuer de se voiler la face, d’une certaine manière… Et d’une autre, ne jamais pouvoir oublier. Les pellicules du direct ne mentent pas, n’omettent aucun détail (à moins de les modifier). La vérité portable, disponible sur une vulgaire clef USB.

Luke a sans doute fait sa crise d’adolescence vers la fin de sa vingtaine. Ce moment où il a eu envie de changer le monde, de renverser toutes les lois et de prouver à l’humanité qu’elle pouvait se soulever pour sauver l’univers. Mais Luke n’était qu’un petit con en plus dans la nature. Il ne marche pas, comme ça, le monde. Et il n’allait sûrement pas lui faire plaisir. Alors cette idée folle qu’il a eu, ce besoin de cracher la vérité sur les pires atrocités, il a fini par le regretter comme avec sa mère. Parce que Luke ne fait jamais les choses bien, il est programmé pour enchaîner les conneries ; c’est en lui, c’est comme ça. S’il faut dire oui, il dira non. Petit con.

Et puis il y a cette malédiction qui coule dans ses veines. Cette acuité d'être lâche et de pouvoir échapper si facilement à la mort. Cette capacité qu'il a de vivre en symbiose avec le danger. Il se régénère. Ce n'est pas aussi spectaculaire qu'on le pense, ce n'est pas magique, mais son corps a sans doute si peur de la mort qu'il pique un sprint vers la renaissance. Luke guérit vite des blessures, il ne tombe jamais malade. Il semble immunisé. La mort a peur de lui.

Alors elle l'effleure à chaque occasion sans le toucher, en prenant les autres et lui montrant à quel point elle est proche.

Lorsqu’il en vient à penser aux atrocités de l’Homme… C’est généralement le moment où sa main attrape la bouteille. Avale. Pas une goutte ne doit le préserver du souvenir. Tout doit disparaître, tout doit s’effacer de sa mémoire : les gens qui hurlent, les enfants qui demandent pitié, les chaires entassées et cette mort puante qui colle à la peau des vivants. Luke ne s’est jamais débarrassé de cette odeur. Il devrait s’arracher la peau pour y échapper, se crever les yeux pour ne plus jamais voir aucun Homme. Parce qu’il voit en chacun les démons qui se sont montrés là-bas.

Il n’y a rien à sauver dans l’Homme. Il n’y a rien à sauver dans ce monde.

Tout est déjà pourri, se décomposant comme une charogne, et les gens passent à côté en souriants, heureux et aveugles.

Luke ne sera plus jamais aveugle. Ni heureux. Il devra simplement oublier.

Alors il pleure sur la tombe de sa mère, la suppliant de se montrer pour qu'il puisse voir enfin quelque chose de beau ; enfin un peu d'espoir, une bouffée d'air pour continuer à vivre. Un peu de pitié. Un peu de Maman.