Esaias | Beautiful disaster.

âge: trente-cinq ans sur le papier, le cœur d’un enfant et l’âme déjà vieille. lieu de naissance et origines: nulle-part, et partout à la fois, les détails de sa naissance lui échappent, son enfance est une succession de paysages différents et similaires à la fois, mais un sang anglais coule indéniablement dans ses veines. statut civil: célibataire ; des promesses chuchotées et reçues au creux de la nuit mais jamais tenues ; un désir de connexion presque viscéral mais la peur au ventre lorsque le mot engagement est lâché. profession: anthropologue judiciaire ; il ressuscite le passé, fait parler les morts. comment avez-vous atterri à la british library: une curiosité débridée, des recherches toujours plus poussées, et enfin, enfin le bouche à oreille opère son charme. qu'est-ce que votre personnage connait/pense du surnaturel: il veut tout savoir, et tout n’est pas encore assez. la fascination est dévorante ; sur les étagères, les livres et feuilles de notes s’accumulent toujours plus - ce qui n’était qu’une lubie d’enfant devient une obsession d’adulte. avez-vous un lien spécial au projet darwin: un sujet qu’il surveille de trop près, un serment qu’il brise ; la transgression est trop tentante, il n’essaie pas de résister. quelle est votre réputation à edimbourg: ombre furtive, il se fond dans le décor ; charmeur quand il le souhaite, discret le plus souvent, distant parfois. traits de caractère: solitaire ; curieux ; désordonné ; désabusé ; analytique ; farouche ; paradoxal ; désabusé ; naïf ; patient ; sadique ; voleur ; calme ; évasif ; instable ; capricieux ; imaginatif ; cynique ; charmeur ; réfléchi ; menteur ; insouciant ; affectueux ; froid ;  imprévisible ; secret ; intelligent ; collectionneur ; innocent ; cruel. crédits: tumblr. groupe: the science.

✝ 001. pratique la taxidermie durant son temps libre ; redonne vie aux morts, croise des espèces entre elles, invente des créatures de toutes parts, joue à Dieu tel un Frankenstein des temps modernes. ✝ 002. imagination trop fertile qui l’emmène dans les recoins les plus obscurs de son esprit ; met des images sur les mots, des sensations sur les images ; il se laisse facilement dépasser, se perd dans son propre univers, dédale infernal. ✝ 004. le mensonge coule aisément sur sa langue ; il réécrit son passé, s’invente des existences hautes en couleur pour tromper l’ennui, pour tromper autrui. ils sont peu à savoir des choses vraies sur lui ; il partage avec parcimonie aux plus méritants. ✝ 005. collectionneur compulsif ; la fin justifie les moyens lorsqu’il s’agit d’agrandir son musée de curiosités. ✝ 006. goût prononcé pour le macabre, bien qu’il n’y voit rien d’étrange ; il est attiré par la mort comme il est attiré par la vie, les deux vont main dans la main. ✝ 007. besoin de stabilité qu’il détruit pourtant à chaque opportunité ; il ne comprend pas les rouages d’une relation, répète les mêmes erreurs à l’infini ; donne trop ou pas assez, s’attache trop vite et se lasse plus rapidement encore. ✝ 008. parle peu, mais clairement, s’entraîne à réciter des vers aux sonorités proches, restes d’une élocution difficile dans son enfance. ✝ 009. nuits agitées ; sommeil impossible à trouver lorsqu’il ne dort pas chez lui, ne reste jamais jusqu’au matin lorsqu’il partage ses draps, n’amène personne dans son alcôve personnelle. recherche de connexion qui ne dure jamais ; des abandons trop brefs, des étreintes trop factices, il continue de chercher. ✝ 010. capable de compassion et de cruauté en égales mesures, la main qui guérit autant qu’elle blesse ; innocence dans son ignorance du mal, sadisme qui s’ignore. ✝ 011. dépendant affectif, il envie le bonheur des autres, jalousie qui le consume, il vole ce qu’il peut voler, est tenté de détruire ce qu’il ne peut pas. ✝ 012. soif intellectuelle qu’il ne peut étancher, curiosité de tout, il passe d’une obsession à l’autre et s’y donne pleinement à chaque fois, entier dans ses élans, il ne permet pas la demi-mesure. ✝ 013. enfant sauvage, amoureux de la nature, il a besoin de respirer le grand air, oppressé par le rythme des grandes villes, agressé par une abondance de données sensorielles, il revient toujours au calme des forêts.

Il a quelques semaines, tout au plus. Abandonné sur le parvis d’un hôpital, comme dans les films où le héros entame un voyage initiatique pour retrouver ses parents. Sauf que lui, on ne lui laisse pas de souvenir. Pas de lettre révélant son prénom ou sa date de naissance, pas de médaillon avec une photo en noir et blanc à l’intérieur, pas de couverture brodée à la main avec des initiales mystérieuses, rien pour révéler quoique ce soit sur ses origines, le secret qui entoure sa naissance. Enfant né du froid, peut-être un présent de Noël mal reçu. Son identité manquante est une ardoise vierge sur laquelle il peut projeter ce qu’il veut. Effacer. Recommencer. Il ne part pas à la recherche de ses parents ; l’idée ne l’effleure même pas. Il a trop peur d’être déçu, de mettre fin à ses rêves les plus fantasques. De toute façon, ils l’ont abandonné. Il veut qu’on veuille de lui.

Il a cinq ans. Ce n’est pas sa première famille, pas la dernière non plus. On le dit adorable, pourtant. Charmant, poli, affectueux. Peut-être un peu trop. Crises lorsqu’on l’abandonne pour partir au travail ; une peur si viscérale d’être abandonné qu’il provoque lui-même la réaction en chaîne qui mène inévitablement à cette conclusion. On l’envoie chez un pédopsychiatre, il se montre peu coopératif. Colorie les dessins qu’on lui donne consciencieusement, mais reste muet. Il surprend des bribes de conversation. Quelque chose au sujet de la couleur rouge et de son abondance dans ses dessins. Le vermillon de la violence. Il enterre le crayon de la couleur honnie dans un jardin. Il apprend que dans l’espace il n’y a pas de couleurs. Il veut devenir astronome.

Il a sept ans. Il y a un monstre dans son placard. Il n’a pas peur de lui, cependant. Le monstre aussi se sent seul. Parfois, il lui tient compagnie et va s’asseoir contre le meuble pour lui parler et lui raconter des histoires qu’il invente au fur et à mesure. Il lui dit qu’il aimerait bien être comme lui, pour qu’ils soient moins seuls tous les deux. Il veut devenir un monstre lui aussi.

Il a neuf ans. Il regarde un oiseau se débattre dans ses mains, l’aile brisée après avoir percuté la vitre de sa chambre. Il ne fait rien, se contente d’observer, curieux. La mort est un concept qu’il commence à peine à appréhender, avec une fascination jugée macabre mais encore normale pour son âge. Il tord le cou de l’oiseau. Les os craquent aisément sous ses mains d’enfant. Ce n’est pas de la cruauté de sa part, simplement de la curiosité, mais devant le résultat, la déception l’emporte. Il essaie de défaire ce qu’il a fait. Il fouille dans les tiroirs, s’arme de fils de couture, d’aiguilles, de ciseaux. Le chat qu’il étouffe sous l’oreiller. Les ailes d’oiseaux qu’il greffe sur le corps, le sang séché sur les plumes. Dans la mort, il a offert a ces deux bêtes la plus belle des métamorphoses, il les a transformé en quelque chose de supérieur, les a fait fusionner en une créature parfaite, à la fois proie et prédateur. Il est fier du résultat, veut partager son œuvre. Erreur. Des cris, des larmes, retour case départ. Il ne comprend pas. Il les a réparés, il leur a donné une seconde vie. On lui dit qu’il ne faut pas faire ça, que c’est mal de défier la volonté de Dieu. Il veut devenir docteur, parce qu'à eux, personne ne leur dit jamais que c’est mal de défier la volonté de Dieu.

Il a onze ans. Il est dans la même famille depuis presque trois ans - un record. Il sait à présent les choses à faire et ne pas faire, à dire et à taire. Enfant modèle, il ment comme il respire, il est irréprochable. La mère est fertile, mais elle l’aime comme s’il était sien. Il y croit ; cette fois sera la bonne. La chance ne reste pas longtemps avec lui. L’impossible se produit. Ils parlent d’un miracle, il y voit une malédiction. Elle n’est pas encore née qu’il déteste déjà sa petite sœur. Syndrome classique de l’enfant qui jalouse l’attention offerte à son cadet. Les heureux parents tentent de se rassurer ; ça passera. Mais plus elle vole une affection qui n’était auparavant dirigée que vers lui, et plus il devient incontrôlable. Peur féroce de perdre sa place, d’être moins aimé que le fruit véritable de leurs entrailles. Les accidents se multiplient, jusqu’à celui de trop. Abandonné à nouveau. Les larmes sont brûlantes sur ses joues. Il veut devenir un petit garçon de bois pour ne plus avoir mal.

Il a quinze ans. Il fait partie des plus âgés à l’orphelinat, à présent. Il est trop vieux pour pouvoir espérer encore trouver une famille d’adoption. Marchandise trop souvent retournée au service après vente. Produit cassé. Dans le jargon des adultes, on dit « instable ». Il se résigne, s’enferme un peu plus sur lui-même. Les monstres sont toujours là, même si tout le monde essaie de le convaincre du contraire. Il continue à ramasser les carcasses, à les étudier sous tous les angles. Quand il peut les sauver, il le fait, toujours. Petites choses abandonnées qu’il ramène clandestinement chez lui pour en prendre soin, comme il aimerait qu’on le fasse avec lui. Il laisse ses expérimentations de côté. L’intérêt n’a pas faibli, mais il prend conscience de certaines étiquettes, de codes à respecter, à défaut de les comprendre ou d’y adhérer, si seulement pour mieux se fondre dans la masse. Il veut devenir invisible.

Il a vingt ans. L’orphelinat n’est plus qu’un lointain souvenir. Oxford lui ouvre ses portes. Etudiant sérieux, il est chaque année majeur de sa promo, décroche la bourse du mérite sans difficultés. Epoque des premières expériences, mais pas des premières déceptions. Il est trop démonstratif, il ne l’est pas assez, il parle trop (mensonges) ou trop peu, il ne trouve pas d’équilibre, ne fait que batifoler d’une extrême à l’autre et se heurter aux mêmes murs, inlassablement. Il ne sait pas suturer les morceaux de son cœur quand il se brise, mais il continue d’essayer. Il entame des études de médecine, se spécialise dans l’anthropologie. La soif de savoir est un moteur comme un autre. Il veut découvrir la vérité.

Il a trente-deux ans. Le mot « Talamasca » est lâché ; il affiche un scepticisme de circonstance, mais son cœur s’emballe, il veut y croire, renouer avec la part de lui qui n’a jamais cessé. Il s’installe à Edimbourg, découvre un nouveau monde avec des yeux d’enfants. Début d’une obsession dévorante dans laquelle il se jette à corps perdu, comblant tant bien que mal la solitude de ses matins, les draps froids au réveil. L’instinct du collectionneur se ranime, les fantasmes du scientifique fou le chatouillent. L’envie permanente de s’approcher, de risquer l’interdit, de défier les lois. Il veut les posséder, toutes ces anomalies de la nature ; observer, décortiquer, expérimenter… à sa façon, il les aime.

Il a trente-cinq ans. Son musée personnel s’agrandit. Des trophées volés, le plus souvent arrachés de force à des dépouilles à qui ils ne manqueront pas, des mémentos permanents de cet univers inconnu qu’il tente de percer, des réponses rassurantes à des images que son esprit a longtemps suppléé sans explications. Il trouve confort dans le danger, s’en approche plutôt que de s’en méfier, toujours plus irrésistiblement attiré par les ombres, peu importe qu’elles aient griffes et crocs du moment qu’il peut les dérober. Il s’éprend de ces créatures, désire leur différence, toujours persuadé qu’il trouvera sa place au milieu des monstres. L’un d’eux attire un peu trop son attention, malheur à lui. Il cède à la tentation ; il s’immisce. Charmeur, le masque bien en place mais qui dissimule mal la lueur de fascination dans les yeux. Il veut Messine.