your mess is mine. (mairead)

Se tourner, et se retourner. Bouger un peu dans tous les sens et ne jamais parvenir à s'endormir. Il y a de ces soirées où sa tête dit juste non. Malgré la fatigue accumulée, malgré l'envie de tomber dans les songes et de ne se réveiller que dix ou onze heures plus tard, son corps n'est pas d'accord. Il n'y a rien de plus frustrant que de ne pas réussir à s'endormir quand on en a le plus besoin. Des soirées au bar qu'il enchaîne, pour ce soir, il veut juste se reposer un peu, récupérer avant de repasser ses nuits à travailler pour une semaine. Mais non, même ça, il faut croire que c'est trop demander. Il serre un peu les dents en regardant le plafond blanc sur lequel la lune fait danser les ombres de l'arbre près de la fenêtre. L'ennui le gagne. Il rumine. Il n'a pas envie de se lever, et pourtant, il n'arrive pas à dormir. Il a tout essayé pourtant ; tomber de fatigue devant la tv, aller courir à s'en épuiser. Rien ne prend. Il se glisse hors des draps finalement, direction une douche, histoire de se remettre les idées en place. Ça lui donnera peut-être une indication sur la suite des événements. Sur ce qu'il pourrait bien faire, à dix heures révolues. Le cinéma est encore ouvert. Les bars aussi. Peut-être qu'il a un casino dans les environs. Ou bien une fête foraine ; au point où il en est, il dirait oui à tout, pour se distraire un peu. Il pourrait aussi aller traîner en boîte. Se procurer du V, et retomber dans le cycle infernal, encore et encore. Mais ça, curieusement, il n'en a pas envie ce soir. Il n'a pas envie de cet excès là. Pas envie de tomber aussi bas. C'est une autre idée qui lui vient finalement. Quelque chose qui s'évade comme ça dans son esprit, et qui se présente doucement comme une évidence. Mairead. Il ne sait pas trop pourquoi est-ce qu'il pense à elle, mais ça semble soudainement être l'idée du siècle. Il va aller voir Mairead. Lui proposer de sortir, de faire un truc tous les deux. Quoi ? Il n'en a pas la moindre idée. Mais si elle s'ennuie comme lui, autant qu'ils s'ennuient à deux. Il ne sait pas si elle va accepter, ou ne serait-ce que lui ouvrir la porte. Peut-être qu'elle fait partie de ces personnes raisonnables qui se couchent tôt en vue d'une journée remplie le lendemain. Il ne préfère pas penser à cette situation. Il préfère se dire qu'elle non plus, elle n'est pas raisonnable et qu'elle tue le temps devant la télévision.

Le temps de s'habiller, de passer une main dans ses cheveux en bataille. Il récupère ses clés, éteint toutes les lampes, tout ce qui pouvait tourner en ce milieu de soirée, et finit par sortir de chez lui, prenant bien soin de fermer la porte. Est-ce qu'elle voudra au moins le voir ? Il n'en a aucune idée, aucun indice. Il ne prend même pas la peine de lui envoyer un message pour lui dire qu'il va débarquer chez elle. À quoi bon. Ce ne serait plus une surprise sinon. Le temps de rejoindre sa voiture, il se remémore le trajet, par où passer, quelles rues éviter. Le voilà en route, au son de la radio. Mairead. Il en sourit, rien que d'y penser. La blonde lui donne le sourire. Même quand elle n'essaye pas, il y a toujours quelque chose chez elle qui provoque quelque chose de bien chez lui. Quelque chose d'agréable, de différent de ce qu'il ressent tous les jours depuis des mois maintenant. Elle lui donne envie de sourire et de rire. De sortir, et de s'amuser, sans pour autant se détruire. Elle lui donne envie de faire des efforts, quand il a depuis longtemps perdu la foi d'en faire pour les autres. C'est curieux, comme relation. Il ne saurait même pas définir ce qui les lie réellement. Est-ce qu'ils sont amis ? C'est une certitude. Mais est-ce qu'il y a plus que de l'amitié, derrière tout cela ? C'est là que les choses se corsent. Mairead, c'est une gentil jeune femme. Il n'a pas envie de l'abîmer, ou de lui faire du mal, d'une manière ou d'une autre. Et pourtant, des fois, ses pensées dérivent. Le mot amitié se fait plus ambigu. Est-ce qu'il compte lui en parler ? Certainement pas. Il préfère garder ça pour lui, comme tout le reste, profondément enfoui dans sa personne. Bref. Perdu dans ses pensées, il manque de louper la bonne rue. Il s'y reprend, et arrive finalement à se garer à quelques pas de chez elle. Il marque une pause dans sa voiture, réfléchissant. Est-ce qu'il devrait faire demi-tour ? Sans doute. Est-ce qu'il va faire demi-tour ? Sûrement pas. Parce que Cesare n'est pas de ceux qui fuient devant leurs décisions. Lui, il les assume jusqu'au bout. Pourtant, il y a mille et une raisons pour lesquelles il pourrait regretter d'être là. Et si elle était avec quelqu'un ? Et si elle ne voulait pas le voir ? Et s'il tombait au mauvais moment ? Et si... Stop. S'arrêter de réfléchir, prendre une grande inspiration. Il sort finalement de la voiture et rejoint la porte de la maison des McIntyre. Il s'avance d'un pas, pour sonner. Puis il attend, quelques secondes, avant que quelqu'un ne vienne ouvrir la porte. « Surprise. » Fait-il avec un grand sourire. « Et tu n'as pas le droit de dire non, je te kidnappe. » Qu'il rajoute ensuite. Elle a l'habitude de son petit côté bizarre, sans doute. Il reste là, planté devant elle, attendant simplement une réaction, une réponse, quelque chose pour que cette soirée prenne un tournant bien moins ennuyant que prévu.