Sujet: Come and Have a Beer ! ft. Irene Andrews Mer 27 Jan - 22:51
Come and have a beer !
James Fallwel feat. Irene Andrews
They Won'T Know who we are.
Pink Floyd, lettre P, section Rock Progressif, The Dark Side of The Moon, année 1973
L’ennui. L’ennui mortel. Celui qui accompagne toujours les pluies diluviennes d’Edimbourg. Pas un chat dehors, pas âme qui vivent. Encore une journée de perdue. James soupira de dépit, se redressa et s’étira. Les bras au-dessus de sa tête il fit le tour de son comptoir et se dirigea vers la porte d’entrée de sa boutique. Le ciel était d’un gris plomb et il se demanda, comme à chaque fois, comment le Soleil faisait pour percer une telle barrière…
Dans ce genre de situation, à son « Come, we’re open ! » Il rajoutait une pancarte plus petite, plus discrète « And have a beer ! » pour piquer la curiosité des clients malgré les cascades qui s’abattaient sur leurs têtes. Ça n’avait marché que deux fois, il ne s’en plaignait pas. Certes, il recherchait de la compagnie, mais sa timidité maladive le rendait aussi loquace qu’une betterave alors imaginez la chose…
Il avait, néanmoins, fait la connaissance d’un vieil amateur de classique : « À cause de cette foutue pluie, j’ai dû m’arrêter pour nettoyer mes lunettes et c’est alors que j’ai vu votre pancarte, heureux hasard n’est-ce pas ? » Comme quoi, les belles amitiés se faisaient sur des équations parfaitement aléatoires !
Doc, il n’avait jamais voulu donner son vrai nom, était un flâneur, un rôdeur, il explorait encore et encore chaque recoin de sa belle cité d’Edimbourg. Parfois, il jouait de son saxophone sur le port à la belle saison pour faire rêver les touristes et, une fois l’hiver venu, il se réfugiait dans les bars chaleureux pour quelques concerts… Il se contentait de vivre sa vie et de rendre visite de temps en temps à James. C’est grâce à lui qu’il s’était mis plus à fond dans ses propres compositions musicales et c’est en partie grâce à ses conseils que James voyait certains aspects positifs de sa vie et qui le poussaient à continuer. Tout simplement.
Penser à Doc lui serra le cœur, il y a 6 mois maintenant que le vieux avait disparu. La dernière fois qu’on l’avait vu était sur le port, à se promener sur les digues par jour de tempêtes. Les vagues avaient été égoïstes et avait voulu le garder pour elles, l’arrachant au monde des Hommes. On n’avait jamais retrouvé son corps.
La seconde fois avait été un peu plus rock’n’roll. Un jeune homme avait tout simplement fait irruption dans sa boutique et après un petit blanc avait simplement sourit en demandant « alors cette bière » il avait l’air d’un animal traqué et pour cause, il avait fini par expliquer à James, après lui avoir arraché la promesse de ne rien dire, qu’il était recherché par les flics pour le braquage d’une petite pharmacie… Ridicule, certes, mais les médicaments étaient pour son père et valaient une petite fortune. Le jeune homme lui avait offert sans rien dire une autre bière et ils avaient parlé du système et de « ce putain de monde de merde ». James se contentait de laisser parler l’autre, mais entendre une passion si brûlante et des idées qui fusaient littéralement dans tous les sens pour changer les choses, de la part d’un pauvre gosse qui disait ne plus en pouvoir de la vie, ça redonnait le sourire et une sorte de baume au cœur.
James lui avait proposé de rester, mais l’autre avait simplement refusé et avait disparu une fois que la nuit commençait à tomber. Il n’avait même pas pensé à lui demander son prénom.
Cette journée semblait sans espoirs. Il n’avait jamais vu les éléments se déchaîner autant. James éteignit les lumières de sa boutique, économie sur la facture oblige, et ne laissait que les néons dans l’entrée. Il s’en retourna à son comptoir après avoir lancé le très emblématique Dark Side of The Moon et replongea dans ses réflexions. L’avantage de ces journées mornes était que le monstre en lui semblait se retirer dans un sommeil profond pour lui laisser le temps de méditer sur la situation désespérée dans laquelle il se trouvait. Trop aimable, vraiment. Il pesta légèrement, ces histoires de vampires, de loup-garou et de soi-disant remède contre son mal le mettaient à cran. Il refusait toujours d’y croire. Une partie de lui rejetait le fait que le monde était encore plus mystérieux et plus vaste que ce qu’il ne pensait… En fait, c’était le fait de ne rien contrôler et de savoir qu’il n’était en sécurité nul part qui le révoltait. Cela voulait dire qu’à tous moments, un vampire pouvait débarquer et vous vider sec ou qu’une sorcière allait débarquer en balai et foutre le feu à sa boutique ou bien qu’il… Il ferma les yeux, qu’il pouvait se transformer à n’importe quel moment et blessé des gens. Il ne voulait pas penser à pire.
Le grelot de l’entrée lui fit relever prestement la tête d’entre ses mains. Avec tout ce qui lui tournait en tête, il était persuadé qu’une catastrophe allait lui tomber pile en coin de la face… Et la semi-pénombre du magasin n’aidait absolument pas !
-« Qui est là ? »
Sa voix ressemblait à celle d’un gosse qui s’était fait dessus. Il avait envie de pleurer, mais malgré tout la peur persistait. Il allait reposer la question lorsqu’une femme, une ravissante demoiselle en imperméable rouge et complètement trempée, apparue en face de lui.
Ok. Il aurait préféré une catastrophe.
La voix encore moins assurée et les oreilles virant brique, il se précipita de lui demander :
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